Sans un mot, chacun règle ses instruments et les mélodies confuses qui s’échappent nous plongent déjà dans l’ambiance.
Je visualise deux cercles concentriques sur lesquels ils sont disposés, tous tournés vers le centre localisé au milieu de la scène, comme autour d’un feu de camp où, en guise de foyer, brûle une forêt d’enceintes retour de scène.
S’invite à cette bucolique veillée un vidéo-jockey, pardon, un super-8-jockey armé de quatre projecteurs et d’une ribambelle de films argentiques qu’il va mélanger, torturer en les passant dans tous les sens imaginables, filtrer, allant même jusqu’à les faire cloquer de chaleur, sous nos yeux ébahis, en guise de chamallows.
Finalement, pas plus de synthétiseurs pour tisser les nappes de son que de logiciel pour bidouiller des effets vidéo, GY!BE! fait dans le vintage, comme s’ils arrivaient tout droit des années 70. Époque d’où pourrait venir leur rock progressif, qui n’est pas sans évoquer quelques expérimentations pinkfloydiennes, s’il n’était pas un peu plus difficile à étiqueter. « Post-rock », « rock expérimental », « rock instrumental », « drone », « dark ambient », Wikipedia hésite ! La construction des morceaux est souvent la même : cela commence avec la superposition des instruments, en boucle, construisant une structure répétitive et planante qui a tôt fait de nous hypnotiser pendant les dix ou vingt minutes où elle va subtilement muter jusqu’au point de rupture qui va nous sortir de notre rêverie, quand le rythme va brutalement s’accélérer, que les deux batteurs vont simultanément cogner sur leurs instruments, comme un orgasme résultant d’un long et patient massage. Le public plane, le public jouit. On voudrait que cela ne cesse pas. Que les rappels se succèdent (sachant qu’un morceau dure vingt minutes, nous n’en aurons qu’un seul ce soir-là).
Ou plutôt que l’on puisse se mettre à côté d’eux autour du feu pour s’immerger plus encore dans leur transe. Ou encore que l’on puisse s’allonger dans la fosse, qu’on aurait pour l’occasion couverte de matelas, pour faire l’amour ou dormir bercé par leurs mélodies.
Encore !
(Image empruntée sur pixbear)
- Pour ceux qui ne connaissent pas ce groupe assez discret il est vrai, sachez que son nom étrange voire inquiétant ne signe pas l’allégeance à Darth Vador ou un autre super-vilain, mais fait référence à un ancien film japonais. Pour en savoir plus, Wikipedia est votre ami.↩