Un garçon avec une béquille (non ce n’était pas Grand Corps Malade) m’interpelle et me demande si j’ai une place à vendre ; je lui réponds que oui, comme l’indique la pancarte. Combien tu la vends ? Combien m’en donnes-tu, que je lu réponds ? 50 Euros, dit-il (NB : pour rappel, le coût du billet est de 69€, et c’est complet, et les places pour Radiohead s’arrachent, m’avait-on indiqué). Je lui réponds d’aller trouver une autre gogo et il s’en est retourné.
J’approche donc du contrôle à l’entrée, je laisse fouiller mon sac et on enlève la capsule de ma bouteille d’eau. Comme on m’avait déjà fait le coup l’année dernière, et que je suis un gros malin, j’avais prévu dans ma poche un autre bouchon d’une bouteille vide, afin de ne pas avoir à me balader avec une bouteille ouverte à la main. Comme je suis un gros con, je n’ai pris qu’un bouchon d’avance et je me suis donc fait zoquer le lendemain (en fait, pas tout à fait zoquer, je l’ai mise de côté encore mais du coup je suis entré avec une bouteille vide, pfff).
Les inévitables bouchons de la région parisienne
NB : en prévoir trois par bouteille pour un week-end
Un des côtés les plus plaisants des festivals (comme si j’en fréquentais sans arrêt !), c’est l’abondance de l’offre. Il y a à l’affiche quelques groupes que l’on aime, quelques groupes dont on a entendu parler et dont on voudrait voir ce qu’ils valent, et puis ceux dont on ne connaît rien (j’imagine qu’un journaliste des Inrockuptibles ne pourrait pas tenir ce discours, mais pour un simple amateurcomme moi c’est le cas). Je me note donc sur mon petit programme les moments à ne pas rater, et pour le reste, je profite en dilettante, en prenant mon temps, celui de me mettre par moment à l’écart du bruit, d’aller jeter un œil à l’exposition photo de JB Mondino (j’ai trouvé excellente sa photo de Dick Anegarn, pour le reste, rien de désagréable mais rien de très fascinant) et aux différents stands qui ponctuent la pelouse sans faire mal aux oreilles.
En début de journée, j’aurais voulu jeter une oreille à Calexico mais hélas je suis arrivé trop tard (le temps de vendre ma place quoi, grrrr). Wolfmother et Dead Pop Club ratés du même coup mais sans regret pour ces deux inconnus à mon bataillon (je le dis sans fard, au risque de passer pour un inculte). D’India Arie et de Neimo, je ne me souviens de rien ; probablement du son qui n’aura pas accroché mes oreilles, j’aurais glissé pour me rendre après une rapide inspection des lieux vers la Grande Scène du fond pour écouter Nada Surf et ça m’a bien plu. Plus tard, je rejoins la scène de la Cascade pour écouter Clap your hands say yeah dont on dit tant de bien et, c’est bizarre, ça ne m’a pas surpris, j’ai trouvé ça sans grand intérêt comme souvent pour les groupes qu’on propulse si vite au firmament du renouveau rock. Je fis ensuite le choix osé d’aller voir French Paradoxe sur la petite scène de l’Industrie plutôt que Dirty Pretty Things dont j’avais pourtant entendu du bien. Intrigué, attiré, par le résumé qui en était fait dans le programme du festival : un groupe qui serait inspiré de Noir Désir et des Pixies, c’était tentant. Je ne regrettais d’ailleurs pas mon choix, même si à mon avis l’influence gainsbourienne prévalait sur celles des géniaux Pixies (qui furent d’ailleurs un bon moment du cru R.E.S. 2005). En outre, j’aime bien entendre des paroles en français, et celles-là étaient assez branchées cul, c’était d’autant plus plaisant. Kasabian et Patrice écoutés distraitement (pardon, la petite brune, je ne savais pas que c’était un beau gosse, j’aurais fait plus attention sinon !!!). Passé un agréable moment devant TV on the radio avant d’aller vérifier de plus près ce que valait The Raconteurs dont on fait aussi grand cas : pas mal, mais encore rien de bien révolutionnaire ; on reprend les bonnes ficelles du pop qui marchent et on les déroule… Que DJ Shadow m’excuse, mais je n’ai pas hésité une seconde à le zapper pour Morrissey que j’avais pourtant vu peu de temps avant sur la scène de l’Olympia. Quand on n’aime, on ne compte pas.
Même si son set ressemblait à celui de ce précédent concert, ce fut pour moi bien agréable de voir qu’il avait su se renouveler tant dans la scénographie (ça reste modeste : toujours le même gros gong et les multiples chemises impeccablement unies et repassées, mais Sacha Distel remplacé par Oscar Wilde en toile de fond, et ses musicos affublés d’un affreux tee-shirt Playboy ?!) que dans la sélection des chansons. Génial Now my heart is full en rappel… Dans le démentiel smithien Stop me if you think that you’ve heard this one before, le glaçant « I still love you, only slight less that I use to » a été remplacé par un plus édulcoré slightly more (le Moz est amoureux, on lui pardonnera).
Et puis j’étais tout de même assez près de la scène, prodige qui ne se renouvellera évidemment pas le lendemain soir, mais n’anticipons pas.
Le plus gros scandale du festival
Il est temps de taper du poing sur la table et dénoncer ce honteux dysfonctionnement, cette aberration, cette annexion insupportable, cette mainmise ignoble, ce verrouillage inacceptable de nos libertés premières, cette entrave à notre jouissance (ahhhh on se sent bien loin de l’esprit de mai 1968), tout le monde aura saisi que je parle de l’ignoble, l’abject, le déplorable monopole d’Heineken concernant la vente de boissons alcoolisées. Je dis « boissons alcoolisées » non seulement parce que je renâcle à appeler « bière » le liquide jaunâtre déversé dans des gobelets en plastique au quatre coins du parc de Saint-Cloud, mais également parce qu’Heineken tenait aussi le seul stand où l’on vendait également du vin (et du champagne). Je salue néanmoins cette initiative qui aura illuminé mon sandwich antillais poulet au gingembre vendredi soir, même si le vin sélectionné par kéken est au bon vin ce que la bière du même nom est à la bonne bière, à savoir un pâle avatar au goût médiocre (mais heureusement fade). Dès samedi hélas, les stocks de pinards étaient épuisés (je les soupçonne bien évidemment d’avoir à dessein sous estimé la demande) et la bière reprenait son infâme monopole.
Grimbergen, réagis ! Guiness, ressaissis-toi ! Kronembourg, euh.. non, Kronembourg, reste profil bas !
Offrez-nous en 2007 autant de variété en bière qu’on en a sur scène (au moins 3 différentes, donc). La liberté doit être notre seul guide.
Faut pas compter sur moi pour me bourrer la gueule à l’Heineken.
Saturday night fever
Samedi, j’arrive encore en retard pour cause de travaux de déménagement. Cette fois, sur le chemin, je ne compte pas les nombreux panonceaux de malheureux à la recherche d’une place. J’aurais probablement pu faire des affaires juteuses avec mon pass, passons. Retard, donc, et passés à la trappe Broken Social Scene, Taking Back Sunday et Fancy. J’arrive pendant le concert de Xavier Rudd dont je ne connaissais même pas le nom (le programme le citait, mais était lui-même totalement silencieux sur celui qui remplaçait probablement à la dernière minute The Organ que je ne connaissais pas plus). Homme orchestre seul sur scène, une sorte de Rémy Bricka aux allures de surfeur australien, nous délivrant une musique à base de percussions, légèrement new age, mais très plaisante. J’adore les percus. (Je confirme, lpb, une musique à pétards ;-) Trip interrompu par É*** qui m’appelle sur mon pour m’avertir qu’elle est arrivée à l’entrée. Ce sera mon accompagnatrice du J2 après un J1 en solitaire.
Nous écoutons la fin du concert de Xavier Rudd, et pof, vlà qu’É*** tombe par hasard sur un de ces potes. Ça m’a rappelé J*** qui ne manquait pas de croiser au minimum une ou deux connaissances à chacune de nos sorties. Bon, quand je suis au bras d’une amante, c’est toujours préférable à croiser qu’une de mes connaissances, mais c’est à se poser des questions sur le prétendu anonymat parisien. Tssss…
Les inévitables bouchons de la région parisienne
Gags repetita placent
Le remplissage d’esgourdes se poursuit sur la grande scène avec les Versaillais de Phoenix. C’est pas mal Phoenix, j’ai même leur premier disque à la maison, mais je trouve que c’est un peu lassant, et je ne sais pas pourquoi mais les groupes français qui ignorent totalement leur langue m’agacent. Kat Onoma, j’adore Kat Onoma, bon, c’était surtout en anglais mais de temps à autre ils avaient le bon goût de glisser une chanson en français. On ne restera pas jusqu’à la fin mais pas pour aller voire Daddy Long legs. De loin, nous écouterons Skin apparemment très appréciée du public. Je n’arrive pas à me souvenir de Dead 60s que je comptais pourtant voir. Rhesus fait partie des machin dont je n’ai pas entendu une note. Pour The Rakes, j’ai un vague souvenir d’avoir écouté quelques morceaux sans accrocher. Ensuite, ce fut l’heure de mon plus grand dilemme pour le festival. Allais-je opter pour Beck sur la grande scène ou pour Grand Corps Malade qui démarrait sa prestation 10 minutes plus tard seulement à l’autre bout du parc ? On choisit de démarrer avec Beck, de toute façon, et de décoller ensuite. Beck fit un beau concert. Assez subtilement, il a démarré par son grand hit Looser, histoire de dire aux fans : « Bon ben voilà, c’est fait comme ça vous n’aurait pas à vous demander à chaque morceau si le tour de Looser est arrivé ». Concert de marionnettes doublées par le vrai groupe, c’était original, assez bien fichu, pêchu, mais on a tout de même tracé pour aller écouter le Dionysien, et ça valait aussi le déplacement. Un petit peu répétitif quant aux thématiques abordées (moi, ma béquille, moi, la puissance des mots, moi, la société, moi, les rimes…) mais un talent indiscutable de slammeur pour autant que je puisse en juger. Editors sacrifié sur l’autel du dieu repas (oh, miam, la bonne tartine saucisse arrosée de bibine), Tokyo Ska Paradise Orchestra sacrifié sur l’autel des Dieux Radiohead sans l’once d’une hésitation.
Une bonne surprise
La bonne surprise de ces deux jours fut quand même le soleil au rendez-vous, ou tout du moins la très faible présence de la pluie qui ne nous aura pas pourri le festival. Quelques douches dans l’après-midi de samedi, une légère fraîcheur peu auguste en soirée, mais c’est juste pour trouver une raison de me plaindre. Ma grande cape n’aura pas beaucoup servi sinon à poser mes fesses sur le gazon sans les mouiller.
Señor Météo, merciiiii ! Tu fus Rock’n Roll.
La(les) créature(s)
J’ai croisé également un couple de jeunes que j’ai trouvé incongru, se tenant amoureusement la main : jeune fille look Gothique (panoplie standard) et jeune homme au look de parfait premier de la classe, tee-shirt sobre bien repassé et pantalon en toile. En terme de mixité, c’était quasiment le maximum atteint par ce festival à la clientèle WASP ; il devait y avoir plus de Noirs sur scène que dans les 55.000 festivaliers. Même le service d’ordre était uniformément blanc. Tout, sauf la bière (je sais, je remue le couteau dans la plaie).
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- prévoir deux bouchons supplémentaires
- ne pas acheter de places en plus en se disant « bah je trouverais bien quelqu’un(e) pour m’accompagner ». Les filles, c’est pas fiable.