Pour la sixième fois, je fais en cet fin d’été mon pèlerinage vers la Mecque parisienne du rock’n roll, le festival Rock-en-Seine qui fête sa dixième édition (il a donc 9 ans). Cette année, j’ai acheté à l’aveugle mon pass 3 jours dès le mois de décembre, sans rien connaitre de l’affiche, bénéficiant juste d’un tarif attractif (99 €, T-shirt collector inclus). C’est donc avec plaisir que j’ai découvert, au fur et a mesure que se révélait la programmation, quelques groupes que j’avais hâte de découvrir ou revoir sur scène : dEUS, Sigur Rós, Dionysos (non que je sois très accro à ce groupe, mais le chanteur est du genre déchainé en live : grosse ambiance en perspective)… Parmi les 3 têtes d’affiche du festival, Placebo me fait le plus envie, et ça tombe bien, c’est ce soir !
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Quelques nuages sombres s’amoncellent sur ce début de festival. Au propre, une météo qui nous annonce un peu de plus. Au figuré, un policier qui refuse que je gare mon scooter à l’emplacement pépère où je l’avais placé 3 jours durant l’année précédente (pour info, quand je suis sorti le soir, j’ai vu ledit emplacement plein de scooters, groumpf). Enfin bref, je trouve une place quelques dizaines de mètres plus loin et c’est parti pour faire la queue 1/ pour le contrôle du billet puis 2/ pour la fouille des sacs (une vraie passoire, comme d’hab, j’ai même fait passer mon couteau suisse que j’avais oublié de retirer de mon sac à dos, désolé) puis 3/ pour la distribution des bracelets pass 3 jours et enfin 4/ pour la vérification du bon serrage du bracelet.
Je me promène nonchalamment sur le site pour découvrir son agencement cette année. Pas énormément de différence par rapport à l’édition précédente qui avait vu naître une pertinente quatrième scène. L’expo Rock-Art se trouve cette fois près de l’entrée (une agréable promenade de fin de journée) et à sa place se trouve le tout nouveau et fort sympathique Rock-n-Roll Circus. Je récupère mon T-shirt collector, essuie deux-trois gouttes de pluie qui ne suffisent pas à rendre les allées moins poussiéreuses (la plaie de ce festival). Trop tard pour écouter Crane Angels, mes oreilles commenceront donc à trinquer aux accords de Billy Talent, qui n’en manque pas pour nous balancer un gros rock qui tache. C’est là que je reçois un SMS inattendu d’un copain qui me demande si, par hasard, je ne serais pas à Rock-en-Seine. C’est son premier RES ; je joue les initiateurs, ravi d’avoir de la compagnie cette année où personne ne devait m’accompagner. On se balade sur le site et nous jetons une oreille distraite aux nappes sonores d’OWLLE. Petite visite sur l’exposition des affiches de chaque édition du festival : je raconte à mon pote mes meilleurs moments sur les éditions que j’ai connue, et je verse une larme sur la première, manquée, non pas parce j’aurais aimé dire « j’y étais » (quoi que…) mais parce que l’affiche était quand même en béton, avec notamment ma chérie PJ Harvey.
On pousse la balade jusqu’à la scène Pression Live pour écouter Grimmes. Ma femme dit que j’ai un penchant pour les chanteuses folles – PJ, Camille, Tori Amos… – et celle-ci pourrait compléter la liste, mais elle ne sied pas à mon accompagnateur qui trouve sa musique trop monotone, alors on déserte la scène, direction la Cascade pour la brit-pop pas désagréable mais sans beaucoup d’originalité des Citizens. C’est un peu le nœud gorgien des festivals : à moins d’avoir des accompagnateurs incroyablement totalement exactement en accord avec nos goûts et pulsions (pour la musique/pour la bouffe/pour la boisson/pour mater les festivalières – pas une très belle moisson de bottes, cette année, snif), on est obligé de faire quelques compromis.
La météo est toujours menaçante avec un ciel tellement bouché de nuages qu’on a l’impression d’être déjà le soir à l’heure du goûter. Asteroids Galaxy Tour ne m’ayant pas convaincu l’année dernière (désolé, K²), nous donnons leur chance à Yeti Lane et ma foi, je ne le regrette pas, malgré la pluie qui s’est cette fois décidée à vraiment tomber. Avant le prochain concert, nous allons voir ce qui se passe au Rock-n-Roll Circus, pour observer les performances des festivaliers sur le rodéo mécanique. Le matelas concave, qui ne manque pas d’accueillir chaque téméraire au bout de 30 à 120 secondes – selon leur habilité – se gorge d’eau sous la pluie qui redouble d’intensité, ce qui fait que la plupart en ressortent non seulement déconfits mais trempés.
Il ne pleut presque plus. J’écoute de loin, puis de plus près Get Well Soon accompagné d’un orchestre symphonique. Grand tralala, mais pas beaucoup d’émotion. Au moins, ce n’est pas aussi prétentieux qu’Archive qui nous avait fait le même coup l’an dernier avec un résultat bien piteux.
Il ne pleut plus et la pelouse du parc, bien séchée par la semaine de canicule qui a précédé, a déjà absorbé toute l’humidité. C’est l’heure d’aller voir Dionysos. Pas forcément un grand fan du groupe1, mais le chanteur est du genre dynamite sur scène, et j’avais envie de voir ça.
De fait, je ne suis pas déçu. Si je porte un intérêt réduit à la musique que j’entends, je prête un œil amusé aux pitreries de Mathias Malzieu, grand spécialiste du slam2, ne se privant pas de plusieurs démonstration, dont une (le point d’orgue de son show) où, tel Michael Phelps, il crawle sur la foule pour rejoindre une trentaine de mètres plus loin la régie, qu’il escalade, pour s’emparer d’un mégaphone et poursuivre sa chanson, avant de regagner la scène en sens inverse.
Sur le chemin du retour vers le centre du domaine, je fais une halte par le stand de la sécurité routière, en espérant y ramasser quelques alcootests gratuits, mais ils n’en distribuaient plus cette année. Depuis que ce bidule est devenu obligatoire dans les véhicules, c’est devenue une denrée rare (NB : on voit en ça ce qui la distingue de la capote, tout aussi recommandée mais pas obligatoire, qui, elle, reste distribuée – en quantité plus mesurée qu’à Solidays – sur le festival). Je pars dépité, mais promets à l’accorte jeune fille qui tenait le stand de repasser venir souffler dans son bidule avant de rentrer chez moi.
Nous profitons de l’heure encore pas trop avancée et de l’absence de concert attractif pour nous restaurer en espérant éviter le rush de 20 heures. Ce sera thaï, correct mais sans plus, et je suis frustré de salade de papaye verte. Pour changer de la bière, je m’offre une pinte de cidre. Le temps d’arriver au début du concert de Bloc Party qui nous offre un concert assez efficace et vivant. Une chanson dédicacée aux Pussy Riots mais aucune activiste sur le site ne vient nous montrer ses seins. En attendant, c’est la lune que l’on voit, puisque le ciel s’est enfin dégagé ; il fait encore un peu jour. Le concert terminé, demi-tour pour passer de la Grande Scène à la Cascade pour LE concert que j’attendais particulièrement dans cette journée, Sigur Rós, que je n’avais encore jamais vus sur scène.
Question : la musique des sphères de Sigur Rós est-elle adaptée à la scène live ? (surtout avec un air frais islandais soufflant sur le site de Saint-Cloud)
Réponse après le premier quart d’heure d’écoute : hmmmm… pas évident. Les musiciens sont dans leur bulle, sans vraiment d’échange avec le public, et c’est donc au public seul de se mettre au diapason, pas forcément aidé par les images clipesques diffusés sur les grands écrans. Pour ma part, j’aurais préféré une vidéographie plus conventionnelle, où l’on aurait vu cette étrange musique se faire. Si c’est juste pour écouter, autant le faire bien plus agréablement dans ma 106.
Réponse au bout de 50 minutes : finalement, oui ! La magie des rythmes hypnotiques commence enfin à faire effet sur moi et je me mets à vibrer en constatant avec soulagement que je n’ai plus l’impression d’assister à un clip grandeur nature.
Pour moi, c’est toujours un mystère d’assister à des concerts lorsque les groupes sur scène ne communiquent pas (à défaut de communier) avec le public. Qu’en retirent-ils (à part des espèces sonnantes et trébuchantes, cela va sans dire) ?
Quel contraste avec un Dionysos, ou, plus sobrement, avec un Placebo dont le chanteur, il faut le reconnaître, à l’avantage certain de parfaitement maîtriser la langue vernaculaire. Placebo, parlons-en, nous déroule ce soir un concert qui m’a bien plu, bien que je sois loin d’être un exégète de leur œuvre. Chaque morceau porte indéniablement la griffe du groupe, et j’en viens à me demander ce qui différencie ceux qui font un rock qui me ravit de ceux qui font un rock qui m’ennuie. Qu’est-ce qui fait que je suis sensible à un style, un type de mélodie… je ne sais pas !
Brian Molko, malgré son maquillage, a perdu sa trouble androgynie ; le visage un peu bouffi par les ans et/ou divers excès, il n’en est pas moins bien présent sur scène et je suis comblé par ce concert qui ponctue cette première journée.
Un peu plus loin, je n’arrive pas à m’intéresser à C2C pas plus qu’à Bromance, et je trouve ça bien dommage car j’aurais bien aimé finir sur une note dansante, comme les autres années.
Demain, peut-être ?
- Quand même, je suis très nostalgique de la Coccinelle qui nous les a fait découvrir – massacrée pendant ce concert, selon Libération, et je ne me range hélas à leur avis.↩
- Je me souviens de l’avoir vu, dans un concert, se jeter dans la foule avec un bras en écharpe !↩