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L’autruche de la politique

Bien longtemps que je n’avais pas commis un billet sur la politique ici-bas, mais le fait est que je n’avais pas – et je n’ai toujours pas – le cœur à ça.

Quand Kayzer Sözy est arrivé au pouvoir, je m’invitais à trouver consolation dans un autre champ que le politique, compte tenu entre autre de l’état lamentable dans lequel la défaite de la gauche avait laissé le PS1. 2012 est arrivé qui aura vu François Hollande l’emporter d’abord à la primaire socialiste (DSK ayant été, juste avant, fauché par l’affaire du Sofitel de New-York) face à une Martine Aubry dont j’espérais la victoire. Deux ans après, Hollande aura réussi ce tour de force de refoutre le PS, pourtant au pouvoir, dans la tourmente2 et de rendre crédible le retour de Sözy qu’on penserait pourtant grillé et archi-grillé avec toutes les casseroles qu’il se traîne3.

Je soupçonne les 16 % de Français ayant encore une opinion favorable de Hollande4 de mentir, de coucher avec lui ou de ne pas avoir compris la question.

Le fait est que je n’arrive même pas à être surpris (oh, peut-être quand même par la vitesse à laquelle la déception est arrivée, et aussi par cette extraordinaire constance dans l’erreur). Je me suis inscrit au PS en 2006, parce que je voulais participer au vote interne et éviter la désignation de Ségolène Royal pour la Présidentielle. Ça a donné le résultat que l’on connaît (pourtant, hein, les sondages la donnait gagnante, initialement, hein !). À la primaire socialiste, j’ai soutenu Aubry parce que je n’avais aucun doute sur la victoire (faut dire que Kayzer Sözy avait fait ce qu’il fallait pour mobiliser le peuple de gauche), mais je voulais un candidat qui réussisse à ancrer durablement la gauche au pouvoir. Au niveau national, ça n’est jamais arrivé. Certes, Mitterrand a été élu deux fois consécutivement, mais au prix de deux cohabitations. Évidemment, Aubry semblait moins consensuelle que Hollande. J’ai quelques amis entre droite et gauche qui ont voté Hollande mais n’auraient pas voté Aubry. Mais je pense qu’elle aurait gagné contre Sözy sans plus de difficulté que Hollande. Et je pense que nous n’en serions pas là aujourd’hui. Oh, il doit y en avoir des milliers comme moi au PS, qui se sentent des Cassandre. Mon sentiment, c’est qu’on se trompe vivement en laissant choisir le candidat par le peuple (je ne parle pas de l’élection présidentielle – quoi que – mais de l’investiture). Avant, le bureau politique désignait le candidat et on ne discutait pas. Puis on a fait voter les militants PS. Maintenant « le peuple de gauche ». Bah, la prochaine fois, on demande juste à IPSOS et ça coûtera moins cher.

À la tête du PS, Hollande n’avait eu de cesse d’essayer de ménager chaque sensibilité et écopa d’une réputation (méritée) d’indécis. Qui peut s’étonner de sa prestation tout aussi fade à la tête de l’état ?! « Tout être tend à persévérer dans l’être… »
Ce qui est fascinant avec Hollande, c’est son obstination à ne vouloir blesser personne (à l’exception notable du mariage pour tous – encore qu’il ait sorti sa grosse connerie sur le droit de conscience, tellement typique). Le problème, c’est qu’il recule devant des personnes qui de toute façon ne voteront pas pour lui et que, dans le même temps, il désespère son propre électorat. Il perd sur les deux tableaux.

La reculade sur la loi Duflot est une énième illustration pathétique des conneries que fait ce gouvernement de gauche (ça va devenir suspect de le désigner comme tel). Ça ne va pas changer d’un iota la situation économique du pays (contrairement à ce qu’affirme le lobby des promoteurs), mais ça va bien continuer d’accroître les difficultés sociales du peuple.

Alors, moi, que fais-je ? Je ne vire pas ma cuti, j’ai toujours été de gauche « sociale démocrate », je vomis la démagogie de Mélenchon, je ne crois pas à la viabilité des solutions de « la gauche de la gauche », je partage un socle commun avec les écolos mais je me sens clairement de sensibilité socialiste. Alors dans cette situation schizophrénique où je n’arrive pas à soutenir le seul parti que je me sens capable de soutenir, je fais l’autruche, je me réfugie dans mon petit confort de bourgeois de gauche, et je répète comme il y a 7 ans :

— Mignonne, et si nous allions tirer un coup plutôt ?


Illustration : © 2012 Aeric Meredith-Goujon
  1. Cf. cette archive.
  2. Faut-il rappeler la branlée électorale reçue lors des deux dernières élections ? Peut-être que oui, vu à quel point le Français a, politiquement, la mémoire courte – pas toi, bien sûr, ami lecteur. Ou bien simplement évoquer l’ambiance tendue de l’Université d’été du PS au lendemain de la nomination du gouvernement « Valls 2 ».
  3. Hélas encore, ces veaux de Français n’ont aucune réticence à élire et réélire les politiques les plus corrompus et à la morale abjecte.
  4. Selon le sondage le plus récent que j’ai pu me mettre sous la main.
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