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Haute gastronomie

Comme cette précédente note le laisse supposer, la bouffe est un sujet qui m’intéresse. Je le précise, ami lecteur, parce que pour les plaisirs de la chair, je crois que c’était suffisamment clair. Pour ce qui est des plaisirs de la chère, je n’avais pas encore beaucoup développé.

J’aime donc faire la cuisine, et si possible bien faire la cuisine. 

Un été, lors d’un séjour dans un gite rural, je suis tombé sur un vieux livre de recettes. Certains se seraient précipités sur des vieux bouquins de la Bibliothèque Rose ou Verte, plein de nostalgie, moi non, je me jette sur un vieux livre de cuisine poussiéreux. Je me souviens avec émotion de la vieille vieille édition du best-seller « Je sais cuisiner » de Ginette Mathiot, qui débutait par des leçons de savoir vivre, comment une bonne maîtresse de maison doit dresser sa table, répartir ses invités, toutes ces règles de bienséance expurgées progressivement à chaque réédition (on voit bien à quoi ça mène : regarde les jeunes d’aujourd’hui, ami lecteur, taper des SMS, ça ils savent faire, mais positionner correctement fourchette, couteau, cuillère à soupe, cuillère à dessert, verre à eau et verre à vin, y’a plus personne. Nan, les dents du couteau vers l’assiette, je te l’ai répété cent fois).

Du vrai bonheur ethnologique, ces vieux bouquins de cuisine.

C’est donc avec enthousiasme que je feuilletais La cuisine moderne illustrée (rédigée par une réunion de professionnels – librairie Aristide Quillet – 1948), et que je tombais sur ce chapitre que je vous retransmets verbatim :

« Les plaisirs de la table sont des plaisirs intimes. Ils n’aiment pas le tapage ni la foule. Quelle grossière erreur aujourd’hui ! Comment croire à l’intelligence humaine quand on voit ces restaurants où l’on danse entre deux plats et au son d’un orchestre nègre bon à nous donner la colique ?
C’est un scandale. On comprend que des nègres qui dévorent du couscous ou des fragments de chair rôtis saupoudrés de la poussière du sol se consolent de cette maigre chère en dansant ; mais des êtres civilisés ! C’est à peine croyable. Un bon repas demande du recueillement et un échange de paroles spirituelles et gaies. »

Quand je pense qu’on ergote encore sur les bienfaits de la colonisation. 

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