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Le dernier tango des bouchers de la Villette

Je viens de terminer Le Boucher d’Alina Reyes, un bref roman érotique qui avait fait un certain bruit (j’entends par là un bouche à oreille favorable !) à l’époque de sa sortie en 1988. Il s’agissait de son tout premier roman qui remporta le prix du roman érotique Pierre Louÿs.
L’occasion de le lire se présenta quand Thyia me le brandit sous le nez en me le conseillant. Je ne pouvais pas dire non et n’en avais nullement l’envie.

Je fus frappé dès les premières phrases par la beauté morbide de ses mots, la précision de son verbe et, un peu plus loin dans le roman, par la moiteur de l’érotisme, force du désir mélange de solaire et d’obscurité.

Je vous en livre un extrait, pas forcément le plus représentatif de l’ensemble du roman mais parce que je suis un sodomite non repenti et que j’aime, dans ce passage, le fragile équilibre entre plaisir et douleur qui fait écho à mon image fantasmatique de cette pratique, quand on la découvre.

Il pleuvait. Enveloppée dans un grand T-shirt qu’il m’avait prêté, je m’étais accoudée à la fenêtre, assise à genoux sur la chaise placée contre le mur.
Si je savais le langage de la pluie, bien sûr, je l’écrirais, mais chacun le connaît, et peut le rappeler à sa mémoire. Être dans un lieu clos quand dehors tout est eau, ruissellements, noyade… Faire l’amour dans l’étroitesse ingrate d’une voiture, quand les vitres et le toit résonnent de gouttes monotones… La pluie dénoue les corps, les rend plein de mollesse et de mouillures… Baveux et s’entreléchant comme des escargots…
Lui aussi était en T-shirt, couché sur le canapé, son gros sexe, ses grosses fesses et ses grosses jambes nus.
Il s’approcha de moi, appliqua sa verge dure sur mes fesses. Je voulus me retourner mais il m’attrapa par les cheveux, me tira la tête en arrière, et se mit à me forcer l’anus. Je souffrais, et j’étais coincée sur ma chaise, condamnée à garder la tête au ciel.
Enfin il entra totalement, et la douleur s’adoucit. Il se mit à aller et venir, j’étais pleine de lui, je ne sentais que sa verge énorme et ogresse tout au-dedans, tandis que dehors la pluie en coupe se précipitait pure lumière liquide.
Tout en continuant à se secouer en moi, à me travailler comme un terrassier en me maintenant la tête en arrière, il glissa deux doigts dans mon vagin, puis les sortit. J’y enfonçai alors les miens, sentis sa verge dure battre derrière la paroi, et commençai à me frotter dans le même rythme. Il accéléra ses coups, mon excitation grandit, douleur et plaisir confondus. Son ventre cognait contre mon dos à chaque coup de reins, et il me transperçait un peu plus, m’envahissait un peu plus. J’aurais voulu libérer ma tête mais il tirait davantage encore sur mes cheveux, j’avais le cou terriblement tendu, les yeux obstinément tournés vers le ciel qui se vidait, et il me frappait et il me martelait jusqu’au plus profond de moi, il m’ébranlait le corps, et puis me le remplit de son liquide chaud, qui sortait par saccades en me heurtant mollement, savoureusement.

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