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Carte postale de la canicule (5)

J’ai lu ce texte chez la trop rare Lux Lisbon et comme souvent, quand je lis un texte érotique (mais à vrai dire le fonctionnement est le même pour la lecture de quasiment tout texte de fiction), je me projette sur un des personnages. Pour moi, un texte fonctionne d’autant mieux que le processus d’identification est facile, ou plutôt que l’on arrive à croire à la véracité des caractères et des situations.

Avec ce texte, mon cinéma intérieur fonctionne bien ; j’accroche au récit même si j’ai du mal à m’identifier au personnage masculin (j’aurais pu, en second recours, essayé de m’identifier au personnage féminin mais ça ne fonctionne pas non plus). Alors je m’accroche à quelques branches… Ces deux amants qui ne se sont pas vus depuis longtemps mais qui répondent instantanément à l’appel du désir (même si dans le texte, c’est l’homme qui sonne la nana et elle qui accoure ventre à terre), ça me rappelle des choses…

Et puis il y a eu cette scène qui m’a cueilli par surprise :

Il vient m’embrasser (…) et me prit la main pour que je le suive à la salle de bains. Je connaissais le rituel ; je crois que c’est peut-être ce que je préférais. Je m’installai accroupie dans la douche, et il s’installa face à moi. Tout doucement, il commença à uriner et je sentis le liquide chaud sur ma peau, mes seins, mon visage, dans mes cheveux (…).

Et depuis cette lecture, cette vision me hante à chaque fois que je prends une douche. Compte tenu de la chaleur ici, c’est minimum une douche le matin pour se laver mon corps, maltraité par les 29°C en dessous duquel la température de notre maison crétoise ne baisse pas, de la sueur de la nuit et une douche le soir, pour me débarrasser du sel et du sable restés collés sur ma peau puisque nous finissons invariablement nos journées par quelques heures de paresse sur une des magnifiques plages de l’île. Matin et soir, douche ; matin et soir, je pisse dans ma douche ; matin et soir, je voudrais que tu sois là pour recevoir mon jet à peine plus chaud que l’eau qui coule le long de mon corps ; et l’instant d’après où nous inverserions les rôles. Le moment où – je ne sais plus si c’est un souvenir ou un rêve – vibre la corolle dessinée par tes lèvres quand gicle enfin ta pisse.

J’ai lu ce texte et mon cerveau y trouve le moyen d’insinuer dans les moindres replis de mon quotidien, comme le sable rose d’Elafonissi fouetté par le vent qui soufflait si fort aujourd’hui s’incruste dans les plis de ma peau, le manque de toi.

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