Site icon Comme une image

La modification

Tu penses encore à lui comme un être dématérialisé, un concept, un fantasme. Pourtant, tu as déjà senti sa bouche sur la tienne, ses mains sur ton cou, son sexe, même, pressé contre ton ventre, tout habillés que vous fûtes, mais ça ne suffit pas. Bien sûr, tu as même senti ses doigts s’aventurer sur ton territoire le plus intime, mais finalement ç’auraient pu être ceux de Pierre, Paul ou Jacques. Tu n’as pas encore franchi cette ligne ténue où pourtant tout bascule, ce moment où tu peux vraiment penser « ça y est », cocher une entaille sur la crosse – gotcha ! –, où vraiment tu te seras abandonnée à lui et où il se sera lui aussi abandonné à toi. Où est-elle, cette ligne ? Quand la franchit-on ? Est-ce le moment où tu prendras son sexe gonflé entre tes doigts, quand il ne sera pas protégé par une muraille de coton ? Est-ce le moment où tu écarteras tes lèvres et qu’il s’enfoncera en toi ? Est-ce simplement l’instant où la porte se refermera derrière vous et que tu te retrouveras face à lui dans une pièce avec un lit ?

Tu penses encore à lui comme une promesse, une possibilité, une envie un peu irrationnelle, car tu ne sais pas ce qu’il sera capable de te donner, ce qu’il sera capable de recevoir ; tu ne sais pas si vos envies se répondront ou pas. Si cette première fois en appellera une seconde ou s’il faut tout donner dans une bataille unique. Te donner. Tu sais que tu peux aller très loin pour lui, bien plus loin pour lui que justement tu ne connais pas que pour un autre que tu connais mieux.

Tu penses à lui et à ce moment que vous allez passer ensemble comme s’il allait répondre à des questions que tu te poses.

Mais il n’y aura aucune réponse, juste des questions supplémentaires.

Illustration : Tony Ward
Quitter la version mobile