Tandis que je lui baise la bouche, je lui commande :
— Répète après moi : c’est la soumise qui a le pouvoir.
— Grlg rgrfl gl…
— Je ne comprends rien, articule ! lui intimé-je, tandis que d’un geste de la main, j’attire sa nuque vers moi jusqu’à ce que ma queue s’enfonce au plus profond de sa gorge.

Après cette petite démonstration par l’absurde, je vous relaie quelques propos tenus sur un discord ami, sur cette question qui déchire le monde du BDSM.
Donc, à propos du poncif (entendu dans un épisode de podcast, mais lu ou entendu moult fois ailleurs) selon lequel, dans la relation D/s, c’est le/la soumis·e qui aurait le pouvoir. Plusieurs choses :
- Déjà, ça me fait penser à un autre poncif du même genre autour de la fellation qui dit que c’est celle (ou celui) qui suce qui a le pouvoir ;
- Curieusement, dans les deux cas, c’est le mec qui « profite » de la situation : se faire sucer (étant moi-même D dans une relation D/s, je n’ai pas honte de le reconnaître)
- Curieusement encore, on dit souvent ça dans un cadre hétéronormé où l’homme est D/ et la femme /s
- Curieusement encore, quand c’est une relation Domina (F) / soumis (H) et que le soumis est « trop » exigeant sur ce qu’il accepte ou pas, on parle de « souminateur » (et plus rarement de souminatrice).
Bref, j’y vois plutôt un message marketing pour flatter les soumises d’être si merveilleusement dociles au service du plaisir de leurs maîtres. Et par ailleurs, le point qui me paraît finalement le plus problématique, c’est de parler de « qui a le pouvoir ». Est-ce ce qu’on attend d’une relation, qu’elle soit D/s ou pas, franchement, avoir le pouvoir ? Le seul point qui me paraît légitime, c’est : est-ce que les deux partenaires y trouvent satisfaction ?
On sait par ailleurs qu’il y a énormément de mecs qui ont des comportements problématiques avec les femmes dans les relations D/s et qui, justement, profitent de cet argumentaire pour jouir d’une partenaire réifiée sans trop prendre en compte ses besoins. Alors, oui, il y a un idéal de relation D/s parfaitement équilibrée, toussa, mais je pense qu’il est pertinent, quel que soit le rôle que l’on prend dans une relation D/s, de prendre du recul et de ne pas mesurer la qualité de la relation à cette histoire de pouvoir, mais plutôt de mesurer l’épanouissement de chacun.

Illustration : Katharina Kranichfeld