Site icon Comme une image

Écrit-on comme on fait l’amour ?

Parmi quelques uns de mes préjugés, on trouvera ma tendance à penser que les gens qui n’aiment pas :

ne vont pas être de bons partenaires sexuels, parce qu’il leur manque quelque chose pour être des jouisseurs « complets », que leur hédonisme est lacunaire et que cela ne collera pas totalement à mon érotisme « solaire ».

J’ai beau avoir croisé quelques spécimens qui ruinent ma théorie, je reste avec un a priori négatif quand une amante me dit ne jamais boire d’alcool ou ne pas aimer danser. Ensuite, si l’a posteriori est une nouvelle opportunité de me dédire, tant mieux, mais j’aurai jugé avant de savoir.

* ✬ *

Si je vois une femme danser avec une grâce particulière, et si de surcroît elle sait s’abandonner jusqu’à danser pieds nus, je vais immédiatement me dire : cette femme est un bon coup (et d’en concevoir généralement une concupiscence aigüe si elle est en plus physiquement à mon goût).

Moi-même, j’aime beaucoup danser, mais je suis un piètre danseur, particulièrement malhabile pour toutes les danses de couple (ce qui me désole). Je me garde donc bien de dire que ceux qui dansent mal sont de mauvais coups.
On va dire que ma règle ne fonctionne que dans un seul sens, d’acc ?!

* ✬ *

En est-il de même pour l’écriture ? Peut-on désirer une personne juste pour l’avoir lue – sans même que le texte nous soit destiné, de même qu’une femme peut danser pieds nus pour son simple plaisir et se moquer d’un éventuel public – et se convaincre, page après page : voilà quelqu’un qui doit baiser comme j’aime ?
Je le confesse impudiquement, pour l’avoir vécu quelques fois par l’intermédiaire de mon burp : oui, je couche parfois de ma plume ! C’est donc qu’il est arrivé que mes écrits aient su résonner chez une lectrice jusqu’à ce qu’elle en conçoive un désir non plus abstrait mais tourné vers ma personne.

Et moi-même, il m’est arrivé plusieurs fois de tomber sur des mots dans la vaste éroburposphère et d’éprouver un vif désir pour des blogueuses dont je n’avais aucune idée de l’apparence physique (Sweetie, si tu me lis…).

Cette réflexion qui m’agite ce soir est le fruit de deux contingences qui se sont croisées cette semaine : une rencontre – encore – avec une plume émouvante (mais serais-je autant ému par ce que je lis d’elle sans avoir découvert dans le même mouvement son incarnation collant pile-poil à mes standards ?) et la lecture de ce passage de Ceci est mon sexe (de Claire Barré) qui survint quelques minutes après que j’ai mis fin à une fellation que me faisait ma femme d’une façon si mécanique que mon désir avait fondu :

Il m’a expliqué qu’il fallait être à fond dans l’instant, ne pas hésiter à surprendre, improviser, changer de rythme, être dans l’écoute sensorielle de l’autre : guetter ses crispations, ses changements de respiration… Et puis surtout : le regarder dans les yeux et avoir l’air de prendre encore plus de plaisir que lui.

(C’est au chapitre 4, p. 42.)

Du coup, je me demande aussi si Claire Barré ne serait pas un super bon coup, elle aussi.

(Qu’est ce que j’ai fait de mon #bromure ?)

Quitter la version mobile