[37] La vie des médias, rubrique euthanasie

Actualité des médias agitée ces temps-ci. Je ne vais pas parler des malheurs de France Soir. Allez, si, finalement, j’en lâche un ou deux mots : à vrai dire, que France Soir coule ne me broye pas le cœur. Tout le monde pleure le journal de Lazareff, mais ça fait un bail que ledit Lazareff doit se retourner dans sa tombe voyant ce que son journal est devenu. Bon, un journal qui coule, ça reste toujours un peu triste, mais c’est moins triste quand c’est un journal médiocre.

Pendant que j’y suis, que doit-on dire pour les personnes incinérées ? Qu’elles se retournent dans leur urne ?

Zurban

J’apprends donc vendredi que l’hebdomadaire parisien Zurban met la clé sous la porte, faute de lecteur. Un des rédacteurs confie « on nous annonce ça [que le précédent numéro sera le dernier, NDLR] d’un coup, sans prévenir, on nous dit que c’est fini, alors que nous étions en train de préparer la prochaine édition du journal » et un autre poursuit « j’aurais au moins souhaité pouvoir expliquer cette disparition à nos lecteurs, mettre un point final à l’histoire ». Une revendication qui a toute mon adhésion puisqu’elle résonne avec mon histoire personnelle et récente…

Je fus un lecteur de Zurban, un abonné, même, puis j’ai fini par m’en lasser. Articles et dossiers souvent un peu creux, bonnes adresses rares. J’en appréciais les critiques cinéma, honorables. J’ai profité assez récemment d’une offre courte de réabonnement pour pas cher, que je n’ai pas souhaité renouveler, mon choix étant conforté par l’apparition d’une rubrique gay & lesbienne. Je ne supporte pas la culture ghetto, et quand je vais boire un verre ou écouter un concert, je ne veux pas savoir si mon voisin préfère sucer les queues ou les chattes, la seule chose qui compte c’est qu’il apprécie la même musique que moi. Bref. Encore un journal à la dérive qui cherchait un moyen d’augmenter son audience et qui, dans la panique, va exactement dans la direction inverse de celle qu’il faudrait prendre : diviser, au lieu de fédérer.

Encore que mes conseils en matière de presse ne valent probablement pas tripette. Mes goûts vont généralement dans le sens opposé de celui du vent. J’adorais 7 à Paris (je vous parle d’un temps…) : disparu. Je me réjouissais de chaque parution de L’autre Journal : clé sous la porte. Je n’avais pas trouvé d’équivalent au Mensuel du Cinéma (superbe présentation et critiques remarquables) : à la trappe.
A contrario, je pleure l’humour décalé perdu du mensuel Max et me désabonne, celui-ci annonce désormais une insolente santé.

Libération

Encore un journal qui va mal et qui ne prend pas la bonne direction, enfin en tout cas pas à mon avis.
On apprenait donc hier que Serge July était sur la sellette, menacé par le loup qu’il avait introduit lui-même dans la bergerie.

Spinoza disait « tout être tend à persévérer dans l’être » et les journaux, c’est pareil (vous voulez une aspirine ?).
Dit autrement, ça revient à : les journaux ont tendance à devenir une caricature d’eux-même, à partir du moment où ils ne font pas un effort de renouvellement. Libération, donc, ne se renouvelle pas, ou en tout cas pas assez, ou à mon avis pas comme il faudrait. Leur tout dernier supplément hebdomadaire Écrans annoncé à grands renforts publicitaires est globalement inintéressant. Pitoyable ! Pourtant, Libé n’est habituellement pas trop mauvais question culture, mais alors là, c’est raté. Je préfèrerai un supplément  » télévision «  tant qu’à faire, je suis sûr que les gens préféreraient ça.

Libération ferait bien aussi de passer un petit coup de Kärcher sur quelques rubriques dont on doit sans doute penser qu’elles font le cachet de ce journal, mais qui en fait sont comme une verrue collée sur le nez ; sans croître particulièrement, on finit par ne voir plus qu’elle, et elle nous exaspère.

Quelques exemples :
– La chronique de Louis Skorecki sur le cinéma
– Les leçons de bonne-conscience-de-gauche proférées par Pierre Marcelle qui était plus drôle et moins pontifiant quand il usait sa plume féroce dans le cahier livre. Finalement, le mépris pour la différence n’est pas une bonne source d’inspiration.
– Le regard homocentrique permanent sur l’actualité

Sur ce dernier point, qu’on ne se méprenne pas : je ne suis pas contre la présence d’article visant à combattre l’homophobie et permettre de faire évoluer la société. Ce qui m’agace, c’est que tout soit finalement vu à travers ce prisme.

À côté de ça, Libération a beaucoup de qualités : une iconographie soignée, une rédaction brillante sur les questions de Justice, un cahier Livres remarquable, un cahier Emploi souvent instructif, un ton décalé agréable qui en fait un canard moins indigeste à lire que Le Monde (encore que parfois, un peu plus de rigueur serait appréciée dans la sélection du courrier et l’argumentaire pour taper sur la droite).

Tout ça fait que l’éjection proche de July pourrait être le signal d’un certain renouvellement attendu, tout aussi bien qu’il ne soit qu’une étape supplémentaire vers la déliquescence de ce titre. Ni optimisme, ni pessimisme. Attentisme.

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