À l’occasion de la sortie du dernier film de Jean-Paul Brisseau, Les anges exterminateurs, nous pouvons constater que la critique est divisée. Il y a ceux, d’un côté, qui hurlent au génie (genre : ah Brisseau, c’est le seul cinéaste français qui nous reste) et ceux, légèrement plus nombreux, qui hurlent (moins fort, mais ils sont plus nombreux alors ça compense), au pire, à l’imposture, au mieux, au navet voyeur.
Pour ceux qui ne situeraient pas trop Brisseau, c’est un réalisateur français dont le film le plus célèbre est sans aucun doute Noces blanches avec Vanessa Paradis dans le rôle d’une lycéenne vivant une liaison avec son professeur de philosophie (Bruno Cremer).
Brisseau a dernièrement eu l’occasion de faire parler de lui à l’occasion d’un procès pour harcellement sexuel intenté par quelques nanas ayant passé des essais pour lui, dans le cadre du casting de son prochain film. Brisseau, en gros, les faisait se masturber devant sa caméra avec des intentions pas 100% professionnelles. Il a d’ailleurs perdu son procès, mais fut faiblement condamné, au motif (légitime, d’ailleurs) qu’il n’y avait pas eu à proprement parler de contraintes, et que les nanas étaient libres de se casser sans avoir à se frotter le minou devant l’animal (notre illustration : Marie Allan, une dont le casting a été probant puisqu’elle joue dans le dernier film de JCB dont il est question ici, dans une scène où elle se prend pour Napoléon).
Il ne faut pas chercher midi à quatorze heure. À mon avis, Jean-Claude Brisseau est un obsédé sexuel (se focalisant sur le plaisir/désir féminin — je ne le blâme pas) et un cinéaste, cherchant à joindre l’utile à l’agréable. Probablement qu’à l’avenir, il continuera probablement dans cette voie-là, légèrement plus prudemment suite à son procès, mais il continuera. D’ailleurs, je ne vois pas pourquoi je dis « Probablement (…) il continuera » ; la bonne phrase est « De toute évidence, il continue » puisque son dernier film est comme un pied-de-nez à son juge. Je vous livre ici pour preuve le synopsis dégoté sur Allociné :
François, cinéaste, s’apprête à tourner un film policier.
Il fait passer des essais pour une scène de nu à une comédienne qui lui révèle le plaisir qu’elle éprouve dans la transgression de petits interdits érotiques. Poussé par le désir d’apporter quelque chose de nouveau dans le cinéma, il décide de mettre en scène un film mi-fiction mi-réalité, tournant autour de ce qui se révèle de façon inattendue une énigme et un tabou : les petites transgressions qui donnent du plaisir. Sa recherche dans le domaine érotique le confronte à des questions de fond auxquelles, tout comme Icare s’approchant du soleil, il va se brûler les ailes.
Les anges exterminateurs est un film diversement reçu par la critique avec, d’un côté, ceux qui crient au génie (on peut faire des super jeux de mots avec cryogénie mais j’ai la flemme), clamant que Jean-Claude Brisseau est le dernier vrai réalisateur français et que son film met formidablement en scène le désir féminin, etc., de l’autre ceux qui crient au navet (et là, on peut s’accrocher pour faire un jeu de mot), voyeur et sans intérêt. Un des critiques de l’émission de France Inter Le Masque et la Plume de ce dimanche (ami lecteur, si ça te tente, je te laisse trouver le podcast tout seul comme un grand : grosse flemme en ce moment) s’étonnait de voir les nanas qui se masturbaient comme si elle « battaient des œufs en neige ». Je ferai remarquer à ce sage monsieur que les femmes se masturbent diversement et que la méthode batteur n’a rien d’incongrue. Il devrait diversifier un peu son champ d’expérience. Pour autant, ce critique appartenait au camp des pourfendeurs du film, et moi qui ne l’ai pas vu (ce film), je le rejoins (ce camp).
Jean-Claude Brisseau, je n’irai pas voir ton dernier nanard, si cul soit-il. Probablement j’y trouverais quelques scènes bandantes, mais je me suis déjà fait avoir avec Choses Secrètes et je ne me ferai pas reprendre.
Car j’ai vu Choses Secrètes, son opus précédent, et j’ai lu pour ce film les mêmes dithyrambes. Or, il s’agit d’un ni plus ni moins d’un nanard, avec des acteurs qui jouent comme des pieds, un scénario indigent et une réalisation sur laquelle je ne me prononcerai pas (je ne sais pas en juger). Il est possible que mon cerveau limité ne soit pas capable d’accéder aux hautes strates de la pensée érotique, m’abandonnant ainsi sur le seuil de la compréhension de son art. Ma conviction (moins humble, certes) est qu’il est toute une frange d’intellectuels qui ont besoin d’une caution intellectuelle pour pouvoir jouir de ce dont ils se privent d’ordinaire pour tenir leur posture.
Je me souviens être allé à la Cinémathèque voir un film de John Woo. Il s’agissait d’un bon film d’action. À la fin du film, la salle se levait en applaudissant. J’ai eu un peu de la peine pour tous ces gens apparemment brimés, obligés d’attendre qu’un film passe à la Cinémathèque pour oser en profiter.
Fort heureusement, avec la mode du cul intello, le porno a également fait son entrée dans les programmes de l’antre de la Culture Cinématographique Parisienne.
Ce qui laisse espérer que tout ce petit monde profitera, je l’espère, de films un peu plus réjouissants que les productions JCB.
Mais où est donc la fabuleuse « unanimité critique » que déploraient hier soir (unanimement) les critiques du Masque et la Plume ?
Ils m’avaient bien fait sentir que le Brisseau serait un pur navet. Et voici une belle deuxième couche !
(Mais je retiens aussi que maintenant je vais pouvoir envisager la Cinémathèque…)
@ prixdeflore2006 (bravo pour le prix et bienvenue sur mon burp qui a reçu le prixdumeilleurburp2008 — oui parce qu’il faudra attendre encore un peu avant que « burp » ne soit l’appellation généralisée) >
Je ne sais pas trop où elle est, cette unanimité annoncée (pas par moi en tout cas) ; ce que je précise, c’est que le sujet d’un film orientera nécessairement la critique qui en sera faite. Mais je dis une évidence : la critique est subjective, pas objective.
Quant aux programmes de la cinémathèque, si tu as la chance de ne pas être trop loin, oui, je t’invite à les surveiller, y’a des chouettes trucs de temps à autre (je ne suis jamais allé voir un porno là-bas, j’ai supposé que ce serait archiblindé et généralement je préfère me branler dans l’intimité).
Access Denied : c’est ce qui s’affiche quand j’essaye de connaitre l’autre méthode de mastubation féminine… :-( à peine s’il n’y a pas les warnings et la sirène ! Décidément, ils sont coincés au bureau !
@ Miel >
C’est bon, le goût de l’interdit, non ? ;-)
Ce que tu rates : c’est une méthode très … démonstrative (!) qui étonnerait sans doute notre critique cinéma (je l’entends dire d’ici : « Non, vraiment, les effets spéciaux de ce film, c’est n’importe quoi »)
Je vais rarement au ciné pour cause de vie de famille.
Cependant, je me suis toujours royalement fichue des louanges et autres stratégies pour remplir les salles de curieux.
Cette année, le seul film que je voulais voir n’est pas passé dans mes salles, c’est dire si je vis dans un trou. Il s’agissait du dernier Terry Gilliam… par contre, on a eu Les bronzés 3 pendant des semaines… grrrrr.
Moi non plus je n’irai pas voir ce film avec des filles qui se tripotent, donc.
Je suis parti au bout de 15 minutes, l’exposé hypocrite des fantasmes du réalisateur, je n’en avais rien à foutre! Foutage de gueule
@ françois >
Ma foi, tu imagines une nana, avec qui tu es en train de coucher, et qui se barre au bout de 15 minutes, en te disant : « foutage de gueule » ? ;-)
Bon, je ne cherche pas à défendre ce film (comme tu l’auras compris), mais juste que parfois il faut faire preuve d’un peu de patience pour goûter le meilleur des choses.
Avant d’entrer dans la salle je n’avais aucun a priori. J’étais même curieux, je n’avais vu aucun film de ce réalisateur, lu ni écouté aucune critique, bref la découverte. Mais au bout de ce quart d’heure, j’ai compris que c’était vraiment de la branlette (comme c’est bien dit!). C’est un navet.
@ françois >
Je comprends bien ton état d’esprit ; j’aime bien aussi aller voir un film sans a priori, sans en avoir lu de critique ni rien. Mais rarement totalement au hasard parce que je ne vais pas souvent au cinéma (quand j’étais jeune et sans enfant, c’était deux fois par semaine, maintenant c’est plutôt une fois par mois). Bref, quand je vais voir un truc, je le vois jusqu’au bout ; même quand je m’y ennuie comme un rat mort. Pour offrir à l’œuvre toutes ses chances.
Ce n’est pas de la mauvaise foi, je suis plutôt bon public même, il est extrêmement rare que je quitte la salle, surtout aussi vite, je n’ai pas l’habitude de jeter l’argent par les fenêtres, mais voir un film est pour moi un plaisir, pas une punition. En général je bois le calice jusqu’à la lie. Mais là vraiment….
Je suis d’accord avec toi, il faut laisser à l’oeuvre ses chances. Mais à cause de types comme ce Jean-Paul Brisseau, d’autres cinéastes certainement plus talentueux ne sont pas produits ni diffusés.
Voila, il ne s’agit pas pour moi d’être en contradiction avec toi par principe (ce serais ridicule), mais des fois ça ne passe pas.
Sur ce, ton blog/burp est très intéressant, et je m’y retrouve.
@ françois >
Je ne t’accuse certainement pas de mauvaise foi ; j’indiquais juste qu’en pareilles circonstances j’aurais (a priori) réagi différemment.
Je ne suis pas sûr que les petites productions cinématographiques de Brisseau prennent la place de beaucoup d’autres œuvres qui ne trouvent pas d’écran à cause des quelques uns occupés par ses films (idem pour le financement). Mettons dans ce sac plutôt les Bessonnades dispendieuses qui n’ont même pas le mérite de l’originalité.
Pour le fait que mon burp t’intéresse, eh bien tant mieux, prends tes aises, lis, commente quand le cœur t’en dit, tu es le bienvenu (public chéri, mon amour).