(et qui n’a pas vu l’ours)
Je n’avais qu’un souvenir vague de ce film de Truffaut, L’homme qui aimait les femmes. Vague, jusqu’à ne plus trop me souvenir quand j’avais bien pu le voir. À la télévision, certainement. En fin d’adolescence, probablement, peut-être même au collège. Vague jusqu’à ne plus me souvenir d’aucune des actrices qui défilaient dans ce film, quant à l’intrigue, je ne saurais dire si ce que j’avais en tête tenait vraiment du souvenir ou de la seule déclinaison logique du titre (« bon, ben c’est un mec qui aime les femmes et qui mate leurs jambes et qui les drague… »). Sans compter la phrase culte croisée à plus d’un détour de burp : « Les jambes des femmes sont des compas qui arpentent le globe terrestre en tous sens, lui donnant son équilibre et son harmonie ».
De ce film, je savais toutefois avec certitude que l’acteur qui l’incarnait était Charles Denner, à la voix grave, chaude et légèrement nasillarde. Charles Denner n’est pas un playboy ni un jeune premier. Il a le sourcil épais et le cheveu noir. Un brun ténébreux avec un charme certain, mais pas universel. Je savais aussi que je l’avais vu avec un grand plaisir, et il me tardait de le revoir, arrivé approximativement à l’âge du personnage1, confronter la consommation compulsive de Bertrand Morane à ma propre relation à la gent féminine, mes fétichismes, mon rapport au désir.
Après avoir emprunté le DVD à une collègue fan de Truffaut, je m’installai un soir confortablement dans mon canapé et enfournai la galette dans le lecteur. Pas quarante mille bonus dans ce DVD premier prix vendu en bundle avec un magazine, allant droit à l’essentiel, je lançais la lecture du film. J’étais assez vite rejoint par ma plus jeune fille, par la lucarne alléchée. Je me suis demandé si c’était un film pour elle, pour conclure qu’à 6 ans et demi, il n’était pas trop tôt pour faire connaissance avec la gent masculine (de fait, elle n’a été choqué ni par le propos du film, ni par les quelques paires de jambes ou de seins qui constitue le summum des scènes érotiques qui y figurent – elle a même trouvé ça bien meilleur que Le mari de la coiffeuse qui est pourtant un film délicieux, auquel mes filles n’ont toutefois pas accroché).
Le film démarre par ce qui constitue en fait l’épilogue de l’histoire, l’enterrement de Bernard Morane, un « enterrement qu’il aurait aimé » car devant sa sépulture ne défilent que des femmes, innombrables (et plutôt jeunes et jolies). Tout le reste est un flash-back (contenant lui-même un flash-back) sur les dernières années de la vie de ce coureur qui n’est pas un playboy, fétichiste des jambes de femmes, ingénieur en aérodynamisme dans le civil et célibataire, tenant à le rester.
Un des aspects du film qui m’a frappé, c’est combien il avait, comme pétrifiée dans l’ambre, conservé l’époque où se situe l’action, contemporaine du film : 1976. Accumulation de détails à tel point qu’on aurait cru une reconstitution à vocation documentaire. Je m’entends expliquer à ma fille : « ça, c’est un téléphone d’avant, avec un cadran qui tourne », « ça, c’est une standardiste : et les fils qu’elle manipule servent à transférer les appels vers les bons bureaux, maintenant c’est fait électroniquement », « le service du réveil téléphoné, ça n’existe plus (ce serait à vérifier toutefois, NDLR), vu que désormais tous les téléphones ont la fonction réveil intégrée », etc. (À croire que les télécoms sont le domaine qui aura le plus muté ces trente dernières années.)
Pour le reste, mon propos ne sera pas de dévoiler le scénario complet de ce film que je conseille vivement à ceux de mes lecteurs qui ne l’auraient pas encore vu, ou qui, comme moi, l’ont vu il y a longtemps et devraient le revoir pour constater que si le film est daté, il n’en a pas vieilli pour autant. Certes, les moyens ont désormais changé, les trésors d’ingéniosité déployés par notre héros pour parvenir à ses fins paraissent disproportionnés devant la simplicité des supermarchés à baise d’Internet (mais Bernard Morane aurait-il la pulsion de séduire sans l’étincelle d’une paire de jambes gainées de nylon ?). Notons au passage son taux de réussite assez épatant. Brigitte Fossey est d’une beauté émouvante. Cette phrase, que j’ai consignée mentalement en me disant qu’il faudrait que j’en parle dans mon burp (déformation professionnelle bien connue chez les accros de la burposphère), en pensant qu’elle changerait de celle sur les « compas » : « Celles qui sont belles de dos et moches de face me donnent une sensation de soulagement, puisque malheureusement il n’est pas question de les avoir toutes », ce en quoi nous divergeons car chaque « moche de face » brise un peu mon cœur d’une histoire qui n’aurait jamais eu lieu de toute façon, puisque moi, je suis totalement incapable de séduire une inconnue croisée dans la rue, et revoir ce film ne m’aura apporté aucune arme supplémentaire pour espérer en être capable un jour. Je me console en me disant que c’est une fiction, mais je sais bien qu’ils existent, en vrai, ces dragueurs, ces cavaleurs, ces hommes qui aiment les femmes…
- pas tout à fait en fait, après vérification, Charles Denner avait 50 ans au moment où il a tourné ce film↩
Storia G-reT » C’est ce qu’on appelle l’éducation, non ? Essayer de forger le caractère et le sens critique de nos gnards !
columbine » On n’a pas vraiment l’impression que les femmes qu’il fait défiler chez lui soient malheureuses, à quelques exceptions près. Enfin oui, il représente « l’éternel célibataire ».
Si complexes, si cruels, jamais héros des autres et même si souvent réel.
Je crains CUI comme toi je ne serais jamais l’un de ceux la … et pourtant …
Oui il existe, mais finalement n’ont ils pas que qq jours d’avances ?
Charles Denner est un homme extraordinaire visuellement et « auditivement » … un homme a part sans conteste.
Une critique décalé (avec le ch’ti monstre) extra :)
oui, ils existent, en vrai, et j’en ai croisé quelques uns, pour mon plus grand bonheur : je ne crois pas, en effet, qu’il faille les éviter : ils nous aiment tant, et si bien !
pas longtemps, oui, c’est vrai, mais je ne crois pas que ce soit si grave : peut être suis-je une « femme qui aime les hommes » ?
merci pour ce texte, CUI : j’ai dû voir ce film au cours de la même retrospective Truffaut :-)
X-Addict » De Truffaut, j’aime aussi beaucoup « Vivement dimanche ». Faudrait que je le revois, parce que je ne me souviens plus trop du film. Juste qu’il était bon !
Monakaï » Bienvenue ici !
Au risque d’aligner des banalités, je compléterai en disant que chacun est unique, je ne sais donc pas si chacun de ces hommes qui aiment les femmes mérite d’être également apprécié par ces femmes qui aiment les hommes (et puisque tu dis en être une, approche un peu voir !)
j’ai moins craqué sur le Dernier Métro, pourtant c’est le film culte de bon nombre de ma génération
au fait, pour le mari de la coiffeuse, je suis plutôt de ton côté (je l’ai enregistré quand il est passé récemment mais suis en cours de visionnement…mouais bof, le thème est sympa mais un meilleur cinéaste aurait mieux réussi)
Enfin, ils essaient d’égaler leur maître, ce personnage créé par Truffaut et son scénariste, et magistralement interprété par Denner.
Certains vont même jusqu’à adopter son nom comme pseudo sur la toile.
Pour autant, dragueurs et cavaleurs, je ne sais pas. Plutôt serial lover, amoureux des femmes et du désir, pas nécessairement jusqu’à les multiplier. Cette fusion peut parfois s’étaler sur plusieurs années.
Davantage Casanova que Don Juan en quelque sorte.
Dédicace à celle qui m’a offert le Guide des jolies femmes de Paris, et qui est devenue une habituée de ce lieu, j’étais hier rue Montorgueil (tout le monde s’en fout mé bon). Quoiqu’en dise l’auteur de ce beau livre, les femmes n’y sont pas plus mieux bonnes qu’ailleurs. Le quartier de l’Odéon est mieux fourni en jolies femmes en proportion.
en fait, je serais curieuse de savoir pourquoi une pièce de théâtre te tente plus qu’un film…et quelles que soient leurs qualités respectives ?
j’espère juste que le jour où tu seras tentée, tu ne seras pas déçue et partagera ce bonheur ! d’autres gazouillis m’aideront-ils, en l’écrivant mieux que moi, à te tenter ?
Bertrand Morane contre tout chacal » Dois-je comprendre, au travers de ce commentaire, que tu te sens toi-même comme une affiliation avec Bébert La Truffe ?
(Paris ne vaut pas Montpellier, en matière de belles minettes.)
Storia X » Y a un rapport avec les films d’Amos Gitaï et cette note, ou bien c’est juste que c’est les seuls films que tu as vu ?
Monakaï » Je pense que Storia veut jouer les snobs ;-)))
bref, je l’ai vu et revu, ce film, qui repasse (assez) souvent, il est…enfin…j’aime beaucoup !
« dragueurs et cavaleurs, je ne sais pas. Plutôt serial lover, amoureux des femmes » : j’ai (un peu) de mal à saisir la nuance :-)
bien sûr, « pas nécessairement jusqu’à les multiplier » : sans le faire exprès, sans tenir un registre des conquêtes, elles se multiplient tout naturellement avec les années…
Ce personnage reste mythique, pour tous les dragueurs un tantinet cultivés, se déclarer héritier serait présomptueux.
Il faudrait demander aux demoiselles que je fréquente. Certaines ont trouvé que ce pseudo collait bien…
Montpellier, je suis d’accord, ça regorge de belles filles. Mais je suis pas trop fan des mentalités du sud perso…
Avec les années, à force, oui nécessairement, on arrête de compter. Sauf que ce sont souvent les mêmes qui reviennent, et qui comptent. Le truc de Verlaine là, ni tout à fait une autre, ni tout à fait la même. Si bien que nombre est moindre au final. Mais plus riche. Plus hard aussi. Dans tous les sens du terme.
Hum, le sud. Je ne me sens pas dans mon élément, rien de plus.
Non, j’ai une meilleure idée, je vais l’emprunter à la même collègue qui m’a prêté L’homme qui …. Elle doit forcément l’avoir !
Pour les nuances entre serial … et autre, je pense qu’il s’agit juste d’un positionnement marketing !
Très BM » On aimerait toujours la même femme, en quelque sorte ?
Oui, moi j’ai noté aussi que y avait certaines composantes qui revenaient plus fréquemment. Mais mon « score » reste encore bien raisonnable, je ne peux pas vraiment faire de statistiques
columbine » Et toi, tu te sens des affinités géographiques ??
BM » Toi aussi, tu faisais des cartes de France ?
Sinon ouais, il en va de la persistance rétinienne. Quand une femme nous a tapé dans l’oeil, et qui n’est restée que le temps d’un éclair, elle reste longtemps (tout du moins sur la rétine).
Même si on voit passer les autres, on ne les regarde pas vraiment bien.
‘Tain, ‘fallait que je devienne lyrique ici. C’est cocasse.
tu évoquais ton goût pour les parisiennes,
et j’avions point fini d’enlever la glaise sur mes sabots ;
mais peut être préfèreras-tu le bonnet en dentelle de Storia ?
dommage, aucune d’entre nous ne s’appelle Hélène… :D
Mais les bretonnes, aaaaaah ça oui. Une m’a marqué. Au fer rouge. J’ai bien morflé d’ailleurs.
Qu’est-ce à dire ?
Vos amants tombent amoureux, et sont malheureux après quand vous les lâchez ?
Boh, chacun son tour.
Huhu, savoureux mélange !
Ca me rappelle les entretiens d’Hitchcock : il disait que pour lui, les femmes les plus sexys sont celles qui ressemblent à des saintes, genre lunettes, chignon, lèvres serrées, petite jupe en dessous des genoux, assises bien sagement, et qui nous défont la braguette à l’arrière d’un taxi tout à fait naturellement.
…………………
Rhaaaaaa. Lovely!
Avec la consonance, je pensais que Tiny était une fille !
Au temps pour moi.
(tu te souviens de la publicité de la pie qui chante ?)
Certaines habituées de ces lieux me connaissent, il suffit de leur demander si j’ai bon goût… :D
Que tu te fasses.
Hum.
Ok je sors.
Dois-je venir en Bourgogne pour ce faire ?
Quel hasard n’est-ce pas ?
L’adresse courriel sur votre blog serait-il à usage restreint ? Je ne voudrais pas causer innocemment quelque ennuis en lisière de Bourgogne…
Si j’osais, je vous proposerais bien un peu de sous-traitance pour les articles car je manque un peu de temps en ce moment.
Bon, sinon, hormis ma préférence marquée pour les brunes, je dois dire que je n’ai aucun critère régional de sélection (ce qui d’ailleurs devrait faire écho à mon prochain billet).
BM, à quelle publicité La Pie qui Chante fais-tu référence ?
Storia, t’arrête un peu d’allumer le chaland ? Je croyais que tu avais ré-épousé Tiny et que tu étais donc de nouveau fidèle. Non ?
Autant pour moi :-)))
Monakaï, je tripe à mort sur les sabots glaiseux. On s’voit quand ?
j’ai point fini d’enlever mes sabots, et ne suis pas parisienne….et en plus, j’ai honte de l’avouer, je ne suis pas brune :-)
toujours aussi pressé de me voir ? :D
La pub de la pie qui chante, avec une magnifique black qui caressait la tête du personnage de bonbons, en lui disant « j’en ai connu des oiseaux, mais des comme toi… ». Et lui de s’envoler tellement qu’il en pouvait plus.
Allez, pour te rafraîchir la mémoire :
http://www.youtube.com/watch?v=Xs74RhGi8Jw
Meuh non, avec Storia c’est en tout vin tout honneur allons !
: Bien vu l’ami. Effectivement, mon adresse est personnelle, et je n’ai jamais encore vu Tiny fouiller dans mes mails… Mais le connaissant, ça ne saurait tarder.
(Je suis patient !)
Storia & BM » Je vous rappelle que je prends 20 % sur toutes les transactions qui passent par ce site ;-)
Je pourrais pas. Ah nan vraiment je pourrais pas.
0u alors je compenserais avec davantage de sexe.
Jusqu’à plus soif…
tu évoquais ta « préférence marquée pour les brunes » : j’ai des cheveux blonds, très longs…jusqu’aux fesses, assez girondes, je crois ;-)
dommage…?
Cela dit, je crois que j’aime les hommes qui aiment les femmes :)
ils nous aiment si bien : ils sont « de passage », reviennent pour mieux repartir, mais ne sont pas maladroits !
…retors, un peu ? mais comment leur en vouloir :-)
Ils sont de passage mais on le sait, c’est le principal. Et comme tu le dis, ils nous aiment si bien, c’est un plaisir.
Mais pourquoi retors ?
je pense qu’un homme qui aime les femmes est charmant, certes, mais aussi charmeur…Benabar l’a dit beaucoup mieux que moi : « ce qui te déplaît, je te le cacherai » (par exemple, mais presque toutes les paroles de cette chanson que j’adore – infréquentable – peuvent illustrer mon propos beaucoup mieux que je ne le ferais) ; tant qu’on ne l’oublie pas, tout va bien :-)
: j’espère ne pas déroger à une règle de ton blog en donnant un nom (ce n’est pas pour en dire du mal, au contraire, mais ça ne m’excuse pas pour autant)
Storia X » J’éviterai la question cochonne que tout le monde a sur les lèvres…
Bertrand Morane » Tu n’as pas de Dieu de Frustration, toi ?
Monakaï » J’aime beaucoup les brunes très brunes, et les blondes très blondes. Ça, c’est pour la théorie. Dans la pratique, je suis beaucoup plus pragmatique, mais tu me permettras de ne me prononcer qu’in vivo !
Emeline » Je suis convaincu qu’il y a une partie de vrai. Certaines femmes sont très réceptives au désir de l’autre et le rendent par effet miroir.
Monakaï » Je ne vois pas de quelle règle tu parles, quel nom tu donnes (bénabar ?). Les règles applicables ici sont assez simples : je me borne essentiellement à rester dans le cadre de la loi puisque j’ai la responsabilité juridique du contenu de mon site, commentaires compris. Donc, par exemple, pas de diffamation !
Emeline » Oh ! Tant qu’à faire, autant être aussi « vrais » que possible dans nos relations adultères, j’en ai déjà ma dose du mensonge ! Mais oui, évidemment, dans une relation amant-amante, on ne donne que peu de chose ; mais ce qu’on donne, on le donne avec enthousiasme !
Mon site, pfffffffffffff, ouais, j’ai pas avancé d’un iota. J’avais fait trois maquettes sous WP, dont une à partir du même modèle que toi d’ailleurs, mais là je manque clairement de temps. Entre le boulot et la vie quoi, ben il reste peu de place…
Storia, je commence à peine…
Monokaï et Emeline : les hommes qui aiment les femmes, les amants, ne sont pas toujours de passage. Deux de mes amis couchent ensemble depuis 13 ans. Ils ont souvent été en couple chacun de leur côté, maintenant encore, mais n’ont jamais perdu cette relation qui leur plaît, sans avoir envie d’aller plus loin d’ailleurs.
Après, les étiquettes, je trouve ça con. Y’a des gens qui se disent en couple, lequel ne ressemble à rien. D’autres qui sont amants, sex-friend ou PCR, mais qui ont une véritable relation suivie et forte, bien au-delà de la simple notion de plaisir, et sans non plus aller aux confins de la vérité. Tout se dire est enfantin. Entre adultes consentants, tout est permis, dans le cadre que l’on se fixe (avec quelques accrocs, nous sommes des êtres humains après tout).
J’enfonce des portes ouvertes tiens.
Quant à la vérité, bien sur je suis d’accord avec toi. Je voulais dire qu’à mes yeux, dans une relation de couple, le but est (entre autres) de connaitre un maximum la personne, alors que ce n’est pas le cas dans une simple liaison.
BM : pour moi, un amant qui n’est pas simplement de passage (que ce soit une fois par semaine pendant 1 an ou 10), c’est plus qu’un amant. Un amant, c’est un ami et du cul, point.
Donc eros + agapé. CQFD.
Storia X » Si elle te lisait ici, elle dirait sans doute pire !
Émeline » Effectivement, en principe, une relation de couple va plus loin qu’une autre relation, dans la connaissance qu’on peut avoir de l’autre (même si, paradoxalement, sur certains aspects, il y en a qui me connaissent mieux que ma femme).
‘Faut sortir un peu mon grand ! :D
Storia X. » Je suppute néanmoins que ce genre de site, ça ne doit pas être trop son truc, non ?