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Retour à l’Overside (3)

Premier épisode ici et second .

Après avoir revêtu une tenue décente (à regret1 !), nous repartons nous promener dans le club. Nous ne faisons qu’un passage express, de voyeurs pressés, dans le baisodrome, puis décidons de faire un petit round d’observation autour du bar. Un verre à la main, on observe les couples aux alentours et échangeons nos impressions. « Ceux-là, ils te plaisent ? » La clientèle de l’Overside est assez composite, ce que je trouve plutôt agréable. Il y a des couples jeunes et d’autres plus âgés, l’inévitable cinquantenaire grassouillet avec à son bras une jolie blonde de 20 ans (et moi alors ? oui mais moi, c’est pas pareil !), des jolis, des moches, des ordinaires. Sur les tenues, aussi, je croise quelques femmes dont les vêtements s’écartent de la mode normative « sexy » réclamée à l’entrée de nombreux clubs pour des raisons « éthiques ». Les femmes sont belles dans des vêtements qu’elles aiment.

Et ce qui devait arriver arriva : j’ai envie de danser ! Car l’Overside a cette particularité assez unique d’avoir une programmation musicale entraînante. Oh ! pas de sélection hyper-pointue et branchée, on reste plutôt dans le standard2 mais choisi avec goût et un certain talent pour l’enchaînement. Le No Comment peut en prendre de la graine (je crois que c’est chez eux que j’ai entendu ce qu’il y a pire en termes d’atmosphère musicale). Envouté par je ne sais plus quel hit, j’abandonne donc A*** quelques instants, qu’elle occupe à mater autour d’elle, pour aller me trémousser sur la piste. Lorsque je la rejoins, elle me désigne la « cible » qu’elle a repérée et que je suis chargé de ferrer. Il s’agit d’un jeune couple, charmant tous les deux, lui plutôt élancé, elle fine aussi, eurasienne à la longue chevelure. J’amorce donc le dialogue. Je constate avec plaisir qu’ils y sont ouverts et nous faisons connaissance. C’est la toute première fois qu’ils viennent en club. (…)

Nous finissons par trouver tous les quatre une place dans un des salons câlin. Une pièce carrée avec un podium central octogonal, ceint par une longue banquette qui longe les murs. C’est là que nous nous posons. En fait de première expérience en club, c’est surtout une première expérience saphique que la demoiselle recherche, qu’A*** lui offre bien volontiers pour la plus grande excitation de son partenaire et des quelques couples successifs qui s’approcheront du spectacle (signalons au passage une femme habillée avec un look d’institutrice sévère à lunettes, très bandante, mais ayant malheureusement elle aussi mis son hétérosexualité de côté). Personnellement, l’échangisme non participatif m’ennuie un peu (c’est la cruelle contrepartie) ne m’excite guère, ce qui fait que quand le jeune homme, ébouillanté par la scène, n’en put plus et pris sa compagne en levrette, je n’étais pas en état de rendre la pareille à A***. Pas loin de nous, sur le matelas central, un homme gamahuche3 très longuement sa compagne. Ils ont tous les deux la cinquantaine bien tapée, et je ne les trouve absolument pas attirants. Je me dis à la fois que c’est une bonne chose, qu’ils soient là, parmi les autres couples, à vivre ce qu’ils ont envie de vivre, même si probablement leur expérience restera solitaire, mais aussi que j’aurais préféré un spectacle plus attirant. La question de la sélection à l’entrée d’un club échangiste n’a pas de réponse univoque.

Après cet épisode, nous refaisons un tour du propriétaire, et puis rebelote, le D-J sirène me rescotche sur la piste de danse. Je vois beaucoup de similitudes entre le plaisir de la danse et celui du stupre, dans les deux cas, notre nature charnelle se met au premier plan et derrière, notre cerveau essaye de contrôler ce qu’il peut de la transe qui nous emporte. Je suis dans un club échangiste, un endroit fait pour baiser, et il y a une petite erreur d’aiguillage dans mon cerveau, c’est de danser dont j’ai envie et ma libido semble une nouvelle fois s’être fait la malle. Je propose à un joli couple qui plaît à A*** de s’occuper d’elle pendant que je danse, et bien curieusement, ils déclinent. Je ne sais pas si c’était notre attitude, ou bien l’ambiance globale du club, mais je n’ai pas senti chez les gens une formidable envie de se mélanger, j’avais l’impression qu’au-delà des échanges de regard, chacun avait une vraie difficulté à engager le contact.

Avec A***, nous sommes allés tous les deux dans la zone matelassée pour voir si nous arriverions à nouer un lien « direct » à défaut d’y arriver par des moyens plus diplomatiques (certains diront « civilisés »), mais ça n’aura rien donné.

L’heure arrive enfin où je n’ai plus à hésiter entre peindre danser ou faire l’amour, il est temps de rentrer. Avec A***, nous disons donc au revoir à l’Overside et je me fais cette réflexion qu’il est tout de même étrange que je préfère cet endroit pour sa piste de danse que ces corps à corps. « Swing ! » comme disent les Anglais.


  1. À cet égard, je préfère le Moon City où l’on n’a qu’à se ceindre d’une serviette ou d’un paréo pour passer d’un endroit à l’autre, sans avoir à reboucler sa ceinture, renfiler ses chaussettes, renouer ses chaussures…
  2. dont un appuyé hommage à Michael Jackson, mort deux jours à peine avant l’épisode relaté ici
  3. ouais, j’en rajoute
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