Ami lecteur, je voudrais commencer par partager avec toi un document vidéo dont j’avais entendu un extrait sur Radio Nova hier matin (chiale ! chiale !) et dont le visionnage intégral vaut vraiment la peine ; c’est remarquable d’intelligence (et d’émotion – re-chiale ! re-chiale !) et la journaliste, Ruth Elkrief, réussit à conduire l’interview avec un tact qui manque à pas mal de ses confrères.
L’interviewée est Jeannette Bougrab, la compagne de Charb, ancienne secrétaire d’État à la Jeunesse et à la vie associative sous Kayzer Sözy (elle est membre de l’UMP). Cette femme a été capable, dans sa douleur immense, de trouver des mots d’une justesse incroyable pour dire les choses comme elles sont et non pas comme on voudrait qu’elles soient.
Je la salue respectueusement, elle a toute mon admiration, et je l’accompagne dans son chagrin.
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Un des points — parmi d’autres – qui m’a frappé dans cet interview est qu’elle parle plusieurs fois de laïcité mais pas d’athéisme. Ça m’a, au premier abord, dérangé. Quand, par exemple, elle dit « Ça ne m’a pas plu quand j’ai vu des gens prier devant Charlie Hebdo parce qu’ils [les victimes] étaient laïques »1.
Et puis j’ai réfléchi. Cette femme est très intelligente et je pense que chacun de ses mots était pesé, je me suis donc interrogé sur ce qui pouvait être sa motivation.
J’ai pensé que, peut-être, elle ne voulait pas réduire la portée du message de laïcité militante de l’équipe de Charlie Hebdo (mais je reconnais qu’il est plus facile de rire d’une caricature anticléricale quand on est athée que croyant, de même que certaines caricatures politiques raillant mon bord peuvent parfois me faire grincer des dents – une pensée pour Jacques Faizant2).
Je me suis dit aussi que l’athéisme, au même titre que la foi, est de l’ordre de la croyance alors que la laïcité est une valeur. La première est donc personnelle, même si elle peut se revendiquer, alors que seule la seconde peut être défendue et appartient à l’espace public.
T’en penses quoi, toi, ami lecteur ?
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Pour finir, je veux partager avec toi un article exceptionnel lui aussi, paru dans le Huffington Post québécois, écrit par un philosophe musulman, Abnennour Bidar, et intitulé « Lettre ouverte au monde musulman ».
Il y figure une brillante analyse de la situation actuelle, sans omettre sa dimension géopolitique, et qui montrera à quel point la situation à laquelle nous sommes aujourd’hui confrontés, en France et dans le monde, n’est pas simple et ne se résoudra pas en un claquement de doigt, et que chacun doit y prendre sa part. Y compris les musulmans humanistes éloignés du fondamentalisme.
(Je rajoute une version PDF pour le jour où ce document ne sera plus en ligne.)
- Ce ne sont pas les propos exacts, mais je n’ai pas la force de replonger dans l’interview pour retrouver sa formulation.↩
- J’apprends au passage que Chimulus – qui a collaboré à Siné Hebdo – est son fils, d’ailleurs !↩
Je ne connaissais pas cette femme.
Très digne malgré la souffrance que l’on ressent immense. Elle a raison. vraiment raison. on a sans cesse fait des compromis en nous taisant ou en protestant mollement. On achetait de temps en temps Charlie Hebdo mais ça ne suffisait pas.
J’ai beaucoup aimé aussi le témoignange d’Audrey Pulvar. http://www.ozap.com/actu/audre.....ert/460920
petit tour du net avant mon retour à l’hp :
(…) Et ce samedi, coup de théâtre, la famille de Charb dément « formellement » tout « engagement relationnel » entre les deux personnes.
C’est Laurent Charbonnier, frère de Stéphane Charbonnier (dit Charb), qui a tenu à mettre les choses au point dans une déclaration à l’AFP: « Nous démentons formellement l’engagement relationnel de Charb avec Jeannette Bougrab ». Laurent Charbonnier précise qu’il s’exprime aussi au nom du père et de la mère du dessinateur.
Et d’ajouter: « La famille ne veut plus que Jeannette Bougrab s’exprime au sujet de Charb dans les médias de quelque manière que ce soit. Nous demandons de respecter le deuil de la famille. » Cette déclaration est « unique », « il n’y en aura pas d’autres », a conclu M. Charbonnier.
(source.be)
@ Dita » Je ne la connaissais pas non plus bien que j’aie certainement entendu son nom du temps de son passage au ministère ; oui, intéressant aussi le témoignage d’Audrey Pulvar qui secoue les consciences.
@ mich-mich » Bonne année !
Oui, j’ai découvert ça tout à l’heure et j’ai trouvé ça très étrange. Ça sent l’embrouille familiale ; j’aimerais bien le témoignage de Luz, par exemple.
Toujours est-il que ce qui me semble important dans son témoignage, c’est plus son sens que l’émotion qui l’accompagne. Si c’est du bidon, cette nana serait mythomane et une excellente actrice. Si c’est pas du bidon, va falloir se poser la question de la santé mentale des zozos d’en face. Enfin, tout ça est bien triste et ajoute de la consternation à la consternation…
Enfin, tout ça est bien triste et ajoute de la consternation à la consternation…
sommes d’accord ! (et bonne année à toi de même)
@ mich-mich » Sur les rézossossios :
https://twitter.com/avalinacrea/status/554019156895739904/photo/1
« Je me suis dit aussi que l’athéisme, au même titre que la foi, est de l’ordre de la croyance alors que la laïcité est une valeur. La première est donc personnelle, même si elle peut se revendiquer, alors que seule la seconde peut être défendue et appartient à l’espace public. »
Cela me semble très juste. Toutefois, la notion de laïcité est très franco-française. Il n’y a tout simplement pas de mot pour la traduire dans de nombreuses langues étrangères, dont l’arabe, justement ( dixit Regis Debray dans ce remarquable entretien sur France Culture: http://www.franceculture.fr/pl.....ay=4973826 ) . Dans ces langues, laïcité est traduit par le même mot que athéisme. Il est donc d’autant plus facile pour les extrémistes islamistes de construire un argumentaire basé sur la confrontation des croyances.
Une putain de chose : la laïcité n’est ni une valeur, ni un équivalent de l’athéïsme. La laïcité, c’est la quasi-totalité de ce lectorat, même moi en tant que catholique. Le laïc, c’est celui qui n’a pas de charge religieuse ou qui n’utilise pas sa charge religieuse pour avancer dans le système. Le système français est devenu laïc lorsqu’on a fini d’employer des religieux en tant que fonctionnaires. ET C’EST TOUT.
Je pense comme toi que croyance et athéisme relèvent de la foi. L’un comme l’autre repose sur un présupposé invérifiable et indémontrable. Dieu existe. Dieu n’existe pas.
La laïcité respecte les deux. Permet aux deux de s’exprimer et fixe les mêmes limites à l’un comme à l’autre. Elle ne demande pas une croyance ni d’avoir la foi, mais de respecter et de tolérer l’autre. Le respect, la tolérance. Ce sont bien des valeurs.
Oui le concept de laïcité est une clé de voûte de notre pays , la France.
Cela veut dire que l on respecte les libertés des individus à vivre leurs croyances dans leurs sphères privées ; que l ‘ on est même prêts à défendre ces droits .
Mais que pour le bien commun ils ne sauraient imposer ces croyances aux autres individus de la société civile . (Ces autres sont bien assez grands où ils devraient l être par un travail de lucidité et de sens critique pour choisir ou pas d avoir telle ou telle croyance) .
Et oui l athéisme est une croyance . Et oui une croyance n’est pas forcément une religion .
Je suis croyante et non affiliée à une religion car je n arrive pas à adhérer complètement à l une d entre elles et que d autres religions, a priori très éloignées de la religion qui fut la mienne dans les premières années de ma vie, vivent des choses qui m interpellent.
Des religions qui au départ, pour la plupart, partent d un bon pieds arrivent souvent à s emmêler les concepts et les dogmes pour monter les humains les uns contre les autres, alors heureusement que la laïcité existe dans certains pays .
Et pourtant de bonnes et belles choses sont réalisées au nom des religions dont les solidarités et les soutiens psychologiques apportés à nos anciens . Donc à moins que les humains ne deviennent plus cons encore il n est pas souhaitable de leur retirer les religions . Mais il faudrait qu ils mûrissent beaucoup pour que les endoctrineurs malveillants toutes religions confondues n aient pas de prises sur eux. Plusieurs voix se sont élevées de tout bords politiques , c est par l éducation au sens noble du terme que nous pourrons armer pacifiquement ou avec de réelles armes les citoyens français ou européens . Beaucoup de politiques dans certains pays , voire même dans le nôtre ont pu penser qu une éducation minimaliste etait une bonne chose pour la sauvegarde de leurs privilèges ou ceux de leur « castes » , hé bien non ! Comme historiquement déjà , preuves sont faites qu il n en est rien .
J ai entendu Éric Orsenna dire comme beaucoup d autres que le terreau de l intolérance et de la violence se trouvait dans la misère et beaucoup dans la misère intellectuelle ( il a pris soin de préciser que ce n est pas un automatisme .)
Terreau veut dire qui favorise l émergence dans certains cas ou si l on plante certaines graines de certains comportements bons ou mauvais .
Hé bien il de notre responsabilité à nous , tous les français de demander à ce que l éducation nationale ai pour objectif que ce terreau soit propice à l épanouissement d humains critiques et responsables ainsi que bienveillants. si on pouvait leur montrer aussi la voix pour être sexuellement responsables et tolérants ça serait chouette également -:)
Entièrement d’accord avec Storia, c’est selon moi la seule bonne explication/définition par l’exemple: nous sommes quasi tous laïcs.
Ce qui ne retire rien à la validité des termes utilisés par J. Bougrab dans ce contexte.
Marrant que tu fasses de la retape pour ce superbe texte d’Abnennour Bidar, je l’ai partagé vendredi passé pour lecture à des amis, ce texte doit être diffusé.
en tant qu’athée, j’ai du mal à être d’accord avec l’idée que c’est une croyance au même titre que croire en dieu. et donc n’importe qui peut lancer n’importe quelle rumeur invérifiable et celui qui n’y croit pas est mis dos à dos avec celui qui y croit sous prétexte qu’il ne peut prouver que la rumeur est fausse? je n’ai demandé à personne de dire que Dieu existe et donc je revendique le fait de ne pas y croire…ne pas croire n’est pas une « croyance comme une autre ». « ne pas croire » serait une croyance si les faits auquels je ne crois pas étaient avérés (exemple « ne pas croire » au « 11 septembre » alors que les faits sont avérés). je ne suis pas sûre d’être claire dans ma façon de m’exprimer mais dans ma tête c’est très clair!
Je rejoins Columbine, l’idée que l’athéisme est une croyance me gêne aussi.
Il n’y a pas de preuve que dieu existe, point. Y croire, c’est bien une croyance. Ne pas y croire, en revanche, me semble être une sorte d’état « de base », par défaut. A priori (i.e. si on se base seulement sur les faits), on ne croit pas.
Quant à la laïcité, oui, c’est une valeur, compatible avec la croyance religieuse tant que celle-ci reste dans le domaine privé.
Merci pour ton blog, sinon !
Je ne suis d’accord avec personne !
Storia. Non ! Le système français est devenu laïc quand une loi a séparé l’église et l’état ET a accordé à toutes les religions les mêmes droits et devoirs et interdictions ne favorisant ni l’une ni l’autre.
La loi de séparation de l’église et de l’état ne s’applique pas en Alsace-Lorraine qui néanmoins est soumise à la laïcité.
La croyance est l’adhésion à des idées ou des axiomes par nature invérifiables. On peut vérifier, authentifier l’existence du 11 septembre, ou de J. C. Croire ou pas, est un pari sur l’existence de dieu qui va avoir des répercussions sur notre système de valeurs, donc nos choix de vie donc notre vie.
L’athée ne croit pas en rien. Il croit que dieu n’existe pas. C’est une croyance.
L’état de base dont parle Sarah n’existe pas. Cette idée suppose qu’on nait athée puis qu’on le reste ou pas. Or l’athéisme tout comme la croyance sont le résultat d’une éducation, d’une expérience et d’une réflexion. L’état de base, c’est la feuille blanche que nous sommes en naissant. Les parents, l’éducation, la société, la vie, ce que nous sommes, nos expériences et le regard que nous portons dessus se chargent de faire de nous des croyants à la supposition que dieu existe ou à la supposition qu’il n’existe pas.
Je sens que le débat va être âpre !!!
Bonne journée.
@carnets d’Eros, va sur la fiche wiki de l’athéisme et tu verras que le terme « croyance » est soigneusement évité pour presque la totalité de la fiche.
juste une question, tu es croyant ou athée? je parie sur croyant ou agnostique!
@ Vagant » Très intéressant de savoir que cette distinction n’existe pas (je ne suis pas allé écouter ton document, pas trop le temps dans l’immédiat mais bientôt, peut-être) ? Toutefois, je ne suis pas sûr que ça compte tant que ça. Que ce jeune Égyptien condamné récemment dans son pays l’ait été pour athéisme (comme indiqué) ou pour laïcisme, c’est kif-kif bourricot.
@ Storia Giovanna » C’est bizarre, tu sembles décrire la laïcité comme un truc « administratif ». Oui, la laïcité, c’est un principe fondateur de séparation de l’Église et de l’État. Alors, si tu ne veux pas appeler ça une « valeur », appelons ça un idéal (ça te va mieux ?) que je tiens à défendre.
Par exemple, la laïcité, c’est ne pas condamner des gens pour leur (non-)religion. C’est aussi ne pas avoir écrit « In God We Trust » sur les billets de banque.
@ Carnet d’Éros » Merci pour cette clarification à laquelle j’adhère totalement !
Notons au passage que l’existence de Dieu(x) pourrait tout à fait être démontrée s’il(s) se pointai(en)t de façon irréfutable. Ce qui n’est pas le cas depuis des lustres, bizarrement.
@ MarieMouillette » Moi, j’adhère à l’essentiel du message humaniste porté par de nombreuses religions. Je dis juste que je n’ai pas besoin de croire à l’existence d’une puissance supérieure pour respecter mon prochain (par crainte d’être jugé après coup, voyez).
Le problème des religions du Livre, c’est qu’on trouve, mélangé à ces messages d’amour de son prochain, d’autres messages un peu plus ambigus (c’est un euphémisme, je vous rassure) du genre « tu lapideras la femme adultère » et que certains se croient autorisés à tuer en conséquence (et je ne parle pas que des terroristes).
@ zoummpapa » J’ai apporté les réserves que tu peux lire ci-dessus à la définition de Storia. Par ailleurs, qu’on partage toi et moi ce texte formidable, j’espère que ça n’a rien d’une coïncidence et que nous serons nombreux à nous y retrouver. Ce texte est d’une pertinence indispensable.
@ columbine » Je comprends ce que tu dis et ton expression n’est pas si confuse mais je ne suis pas d’accord. Il y a une question métaphysique de base « Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? » auquel le rationalisme athée le plus radical (et le mien l’est, j’y reviendrai dans une note dédiée) ne répond pas vraiment et qui justifie pleinement à mes yeux la croyance en une entité supérieure.
@ Sarah Pompom » Je te souhaite la bienvenue ici (et merci pour ton appréciation !). Pour le reste, je te renvoie à ma réponse à columbine.
@ Carnet d’Éros » À nouveau pleinement d’accord avec toi ! Tu me coupes même pas mal d’herbe sous les pieds par rapport à mon projet de note sur mon athéisme – eh eh eh !
Peut-être que l’état de base, ce serait agnosticisme. Ce non-choix de lavette ! (je plaisante, je plaisante !)
@ columbine » Moi, je parie sur athée parce que je le suis et que je suis archi en ligne avec ses propos ;)
Quand à Wikipédia, ça ne démontre pas plus que l’athéisme n’est pas une croyance que la Bible ne démontre l’existence de Dieu, si tu veux mon avis !!!
@ Columbine, J’ai eu l’occasion de constater que les athées sont très gênés par l’idée que l’on puisse croire qu’ils croient. J’ai discuté de la chose avec une copine prof de philo et un autre pote et tout deux sont révulsés par cette idée !
pas encore eut le temps de lire ton lien Wikipaedia.
Mais mes copains philosophes ne m’ont guère convaincus !
Heuuu je voudrais pas en rajouter mais croyance vient de croire .
On croit à quelque chose souvent sans preuve dans ce que l’on nomme une croyance.
Et on a aucune preuve irréfutable de l’existence d’un dieu ou de plusieurs quels qu’ils soient
Mais on a aucune preuve irréfutable non plus qu’il(s) n existent pas,
surtout que l’origine de l’univers ou des univers n’est pas déterminée avec certitude non plus ;
on ne connaît que des bribes ou les mécanismes qui sont à l’œuvre, par des théories de nos chers scientifiques qui sont très partagés d ailleurs au niveau croyances.
Pour finir, une question très vache pour ceux d entre vous qui se disent athées et ont déjà perdus des êtres chers ; n’avez vous pas trouver un certain réconfort auprès d’un rituel de croyant même si ce n est pas vous qui l’aviez demandé…. J’étais devenue athée, croyais-je, mais à cette occasion je me suis rendue compte que je me méfiais surtout des religions.
@MarieMouillette, et bien non, aucun réconfort auprès d’un rituel de croyant. je ne ressens absolument rien lorsque je dois assister à une messe par exemple. je suis insensible à toute idée de dieu/DIeu. on peut dire que je suis sourde et aveugle à toute tentative d’être touchée parl a grâce divine :-)) je ne trouve pas du tout la question vache!
Effectivement, il y a des scientifiques croyants, l’un n’empêche pas l’autre!
question vache à mon tour, s’il y a un Dieu unique, pourquoi y-a-t-il eu et y-a-t-il encore autant de modèles de divinités, religions etc. au cours des millénaires depuis que les homo sapiens existent? et s’il n’est pas unique, comment croire que sa religion est la « bonne » (puisque chaque(s) dieu(s) de chaque religion procclame qu’il est le bon?)
Columbine, ma chère, Le croyant de chaque religion a la bonne et vrais réponse à tes questions ! Il en est convaincu en tout cas. Nous, les mécréants…
ouh là ! quelle salade…
Bon, essayons de trier :
Non, être athée, ce n’est pas une croyance, a fortiori une religion. c’est une conviction.
on peut croire en certains concepts ou valeurs sans pour autant que cela soit ni des croyances ni des religions. la liberté par exemple, la fraternité, l’indépendance… le corpus de règles que sont « les droits de l’homme » relève selon certains d’une religion plus que d’une morale mais on n’est pas obligé d’être d’accord. bref. chacun a ses convictions et certaines sont religieuses. mais pas toutes, et ça se discute.
La laïcité est bien plus ancienne que la loi de séparation de l’Église et de l’État : cela date de la séparation du spirituel et du temporel, en matière juridique ; disons au IIIè siècle, quand les clercs en eurent raz le bol de traiter des affaires religieuses. autrement dit « rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu » qui a dit ça au fait ?
le message clair mais ô combien oublié : politique (autrement dit, l’ordre public) et religion doivent être séparés. faut-il y voir que ceux qui ont séparé l’Église et de l’État auraient fait … oeuvre religieuse ?
l’ordre public est autonome de la religion et impose la tolérance, c’est ça la laïcité
cette autonomie va de soi ici. on aimerait que ça soit global mais ce n’est pas gagné. Et la tolérance n’est pas sans limite, pour survivre, c’est son paradoxe (cf. K Popper).
vouloir que l’athéisme soit une croyance, c’est revenir au « culte civil » et donc admettre l’ordre public soumis à un culte (dont on arrive assez mal à définir le dogme quand même) et donc la hierarchie des pouvoirs. on espère s’être affranchi de ça.
venons en à la question métaphysique du pourquoi quelque chose plutôt que rien ? vaste question ! je reconnais là une certaine propension à la masturbation cérébrale tout autant qu’une appétence à l’enculage de mouches…
alors, juste pour participer : est-ce que le rien est possible ?
La question n est pas vache ; d ailleurs jadore les veaux, les vaches , les cochons …
Je ne suis pas persuadée qu’il n’y ai qu’un seul dieu
si l’on choisit une croyance avec lucidité et tolérance
on peut envisager qu ‘il y ai d’autres croyances dont les préceptes sont bienveillants et qu’elles pourraient détenir elles aussi des parts de vérité.
Je persiste à croire avec conviction que la distinction entre croyance et conviction est une argutie d’historiens.
L’enculage de mouches est aussi nécessaire que le pompage des shadoks ou la minute de monsieur Cyclopède
mais si c’est du grand art ce n ‘est pas celui de la manipulation qui est un art mineur .
merci beaucoup J de m’avoir fait connaitre ce beau texte bienveillant et courageux. L’auteur est un vrai philosophe politique et humaniste.
merci Brigit pour tes précisions d’une clarté cristalline. un petit bémol pour ta réponse à la question métaphysique, c’est une pirouette qui a l’efficacité de l’esquive :-)
et merci à MarieMouillette pour sa réponse pleine de contradictions à ma question bovine ;)
La laïcité suppose que l’état soit neutre du point de vue religieux, la séparation du politique et du religieux et la garantie que la liberté de culte soit garantie à tous. Je pense que s’il fallait choisir une période ou aucun de ces critères n’est réuni on pourrait choisir le IIIeme siècle, période de crise politique dans l’empire et particulièrement sensible aux questions religieuses et de conflit entre payens et chrétiens auquel participe le pouvoir politique.
Notons qu’au moyen-âge un laïc est un baptisé qui occupe des fonctions dans l’église sans être clercs cad sans appartenir au clergé…
Quand Jésus dit de rendre à César ce qui lui appartient, il parle de l’impôt. Il dit donc qu’il faut le payer. En aucun cas il n’evoque une séparation du religieux et du politique, notion inconcevable à l’époque.
L’ordre public n’a aucun rapport avec la laïcité. Celle-ci est un concept de non interférence du religieux dans le politique et réciproquement. Pas une manière de gérer ou de concevoir l’ordre public.
Le culte civil de la Révolution est sans rapport avec l’athéisme. C’est le culte de l’état, c’est la lutte contre la toute puissance de l’église. Pas de Dieu ! L’athéisme à cette époque ? Ça doit tellement peu exister !
@CdE la laïcité impose le principe de neutralité. le corollaire de la république laïque, dans son principe premier, c’est la liberté des cultes.
rien de supposé ici
la séparation du temporel et du spirituel au IIIè siècle est un fait, pas un ‘choix’. les prémices, au IVè, d’une laïcité qui « tolère » tous les cultes un autre fait (Constantin, Edit de Milan)
Jésus ne répond pas sur l’impot mais à une question sur la loi juive. c’est donc une question de légalité (licéité pour être exacte : l’impôt est-il conforme à la loi juive) et là résidait le piège. on lui demande bien de trancher entre la loi de l’occupant et la loi religieuse. la réponse est … limpide, mais pas tranchante.
la République garantit la liberté des cultes en son principe premier : la laïcité. La république s’impose la neutralité en deuxième principe.
MAIS la liberté des cultes n’est garantie QUE DANS LA LIMITE où elle ne trouble pas l’ordre public.
La neutralité du service public (instrument de la République) qui ne favorise ni ne discrimine aucune religion, concorde en ce principe même au maintien de l’ordre public.
la laïcité est donc limitée, sinon soumise à l’ordre public tout autant qu’elle y contribue.
à part ça, fondamental, pas d’interférence sur ligne, on s’entend fort et clair…
le culte civil de la Révolution n’est pas le culte de l’Etat. c’est une tentative d’instaurer « quelque chose » à la place du catholicisme, religion de l’ex royaume de France, état absolutiste certes mais où l’église était assez loin d’être toute puissante. ce quelque chose (etre supreme) devient donc un culte d’Etat. mais ne s’assimile pas à l’Etat. la lutte est contre l’Etat absolutiste, pas contre l’Eglise.
vous avez raison, l’athéisme « existe peu » durant la Révolution française, à part quelques intellectuels… qui ont eu un role très mineur dans l’accomplissement de ladite révolution, n’est-ce pas ?
et je pense bien que c’est encore le cas aujourd’hui, c’est une conviction peu populaire finalement.
heureusement, on guillotine moins maintenant, mais on fouette encore…
L’empire romain est fondamentalement religieux. Et la sphère du religieux est étroitement imbriquée dans celle du politique. Chez les romains, ce qui se passe sur le plancher des vaches est le pendant de ce qui se passe au ciel. La pax romana est le résultat de la pax deorum. La paix des dieux. Il ne faut donc pas contrarier ces derniers. Tous les cultes sont donc acceptables, pourvus que le Dieu soit ancien et ait fait la preuve de son efficacité. Dès lors, les Romains n’interdisent pas les cultes anciens des peuples conquis. Ce serait contrarier la pax deorum et donc la pax romana. Ils préfèrent imposer le culte de l’empereur qui s’ajoute aux cultes locaux existants.
Ce qui fonde la validité d’un culte est son ancienneté et le caractère divin de son fondateur, chose qui sera refusé au christianisme par le sénat au 1er siècle.
A partir du 2ème siècle puis au 3ème, l’empire traverse une sombre période d’instabilité et de troubles politiques et militaires. L’analyse romaine conclut que si la pax romana est menacée, c’est parce que la pax deorum l’est aussi. La faute en est rejeté sur les chrétiens puisque leur fondateur n’est pas divin (décision prise par une instance politique, le sénat) et puisque ce culte est récent. D’où les persécutions.
Au IIIème siècle, les mentalités de certains évoluent. C’est l’époque des tétrarchies. Il y a 4 co-empereurs.
Diocletien est des anciens, c’est la vieille école. Il fracasse du chrétien tant qu’il peut. Pour les raisons mentionnées plus haut d’autant plus que les chrétiens étant strictement monothéistes, il refusent le culte de l’empereur.
Constantin pense différemment. (Il n’est pas Romain, ni même Italien , mais nait dans les Balkans. En actuelle Serbie je crois, d’où peut-être une approche différente ?). Pour lui, le culte des chrétiens n’est pas si illégitime puisqu’il est ancien (il a trois siècles) et le fait qu’il survive au milieu de ce flot de persécution prouve l’efficacité de ce nouveau dieu. Dès lors, la solution au bordel ambiant consiste pour lui a laisser ce culte exister. C’est donc un choix politique.
Il est amusant de constater que l’événement qui précipite sa soit disant conversion relève de l’interprétation d’un rêve qu’il fait avant la bataille du Pont Milvius. Il voit des…. des signes. Le clergé chrétien qui l’entoure dit qu’il a vu des croix. Le clergé païen qui l’entoure dit qu’il a vu des roues solaires (culte d’Apollon). Chacun en tire une conclusion opposée. Pour le clergé chrétien qui l’entoure, c’est clair, il doit combattre avec l’étendard du christianisme. Pour les païens (des prêtres ?) aussi. Il doit combattre au nom d’Appolon. On sait le choix qu’il a fait, le christianisme, avec promesse de tolérance et de baptême. Pour des raisons militaires cette fois. Il tiendra parole avec l’édit de Milan (313) qui légalise l’exercice du culte chrétien qui, dès lors n’est plus persécuté.
Ainsi voir en l’édit de Milan le début de la laïcité me paraît pour le moins abusif. Certes il énonce un principe de liberté religieuse. Certes il y a la théorie des deux glaives. A l’empereur les corps, au clergé les âmes. Dans les faits, le clergé murmure à l’oreille de l’empereur (le pouvoir politique) et celui-ci, Constantin, réunit au moins trois conciles (Arles, Nicée et … ?) pour régler des questions de dogme (on est donc dans le cadre du religieux dans lequel s’immisce le pouvoir politique). Nicée règle la question de la divinité de Jésus. Il fallait bien que JC soit de nature divine pour ancrer l’idée de la légitimité de ce nouveau culte ! Constantin a oeuvré dans ce sens et impose des décisions religieuses (dont celle de la divinité du Christ) pour des raisons politiques.
Des l’instant ou le christianisme est devenu légal il a obtenu de la part de son prestigieux défenseur de nombreux privilèges et est resté dans la proximité de sa cours, siège de toutes les décisions politiques.
En 380 je crois que c’est l’Empereur Théodose (mais vérifier date et empereur) fait du christianisme la seule religion de l’empire. Encore une décision portée par un politique qui a une portée religieuse ET politique… laïcité, vraiment ?
La séparation du temporel et du spirituel, à cette époque, ça n’existe pas.
l’adoption du christianisme correspond peut-être à une démarche religieuse personnelle de Constantin, mais elle poursuit un objectif politique, l’unité de l’Empire.
L’idée selon laquelle l’édit de Milan serait le debut de la laïcité correspond à la vision officielle de l’église catholique exprimée pat Mgr Scola et reprise par un certain Benoît XVI dans un document officiel de l’église qui critique violemment le laïcité à la française et qui explique que l’église véhicule un message « naturel » que les gouvernements se divent bien d’écouter. Car sans cela il n’est point de vraie démocratie. C’est écrit. Le Vatican appelle ça « la laïcité vraie » ! Celle ou l’église dicte les lois. Faut lire ce texte, c’est hallucinant !
Je m’étonne qu’une athée se fasse la fidèle porte parole du Pontifex Maximus et de l’église catholique ! Comme quoi le « RIEN » que quelqu’un revendiquait plus haut est plus difficilement tenable qu’on ne le pense.
Evangile selon Marc, XII, 13-17; selon Matthieu, XXII,21; selon Luc, XX, 25. Les pharisiens tendent un piège à Jésus. Ils veulent le faire arrêter pour avoir fomenter une rébellion fiscale contre Rome… ou alors, ils veulent prouver qu’il n’est pas le messie. (S’il dit oui, vous pouvez payer, il ne peut pas être le messie). Bon, on s’en fout, ils veulent se débarrasser de cet encombrant personnage qui vient mettre le bordel dans leur plate-bande.
Extraits de la discussion rapportée dans l’évangile selon Marc (ce sont les Pharisiens qui parlent) :
« Maître, nous savons que tu es vrai, et que tu ne t’inquiètes de personne ; car tu ne regardes pas à l’apparence des hommes, et tu enseignes la voie de Dieu selon la vérité. Est-il permis, ou non, de payer le tribut à César ? 15 Devons-nous payer, ou ne pas payer ? Jésus, connaissant leur hypocrisie, leur répondit : Pourquoi me tentez-vous ? Apportez-moi un denier, afin que je le voie. 16 Ils en apportèrent un ; et Jésus leur demanda : De qui sont cette effigie et cette inscription ? De César, lui répondirent-ils. 17 Alors il leur dit : Rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu. Et ils furent à son égard dans l’étonnement. » (selon la traduction du pasteur Louis Second). Le tribut à César, c’est bien l’impôt. Il va de soit que derrière tout cela, il n’y a pas un brin de laïcité. Il y a juste un piège tendu à JC qui s’en sort par une pirouette dans laquelle je ne vois pas où il évoque que le temporel et le spirituel sont strictement séparés, que l’état est neutre ? La question ne concerne même pas l’égalité des cultes. Puisque chez les juifs strictement monothéistes (ce qui ne manque pas d’en faire de grands originaux dans l’Antiquité polythéiste) l’exercice du pouvoir politique ne s’exerce là aussi jamais très loin de ce que disent les prêtres et dieu lui-même. En gros JC il dit quoi ? Qu’on peut rendre un culte à Dieu et payer l’impôt à Jules. C’est la laïcité ça ????
Je ne comprends rien à votre affirmation selon laquelle l’exercice de l’ordre public est lié à la laïcité.
Tous les états font régner un certain ordre public. Celui de l’état laïc est différent (sur la forme et sur le fond) de celui qui existe en Iran qui est une théocratie (on peut dire ça vous croyez ?)… mais il existe quand même ?
Quand à la Révolution, en fait, j’avais cliqué sur « zou » avant d’avoir fini d’écrire. J’écris d’abord les grandes lignes puis j’affine et j’affine. J’avais même demandé à CUI d’ôter la réponse car elle ne reflétait pas vraiment ce que je voulais dire et puis vous avez sans doute répondu avant … bon, on va laisser tomber hein ! C’est pas très grave.
Aller tchou, bonne soirée à toutes et tous !
@carnets d’eros: !!!!!!!!!
sinon:
« Je m’étonne qu’une athée se fasse la fidèle porte parole du Pontifex Maximus et de l’église catholique »
si je cite Hitler, ça fait de moi une nazie? citer un fait historique n’est pas se faire le porte-parole de…mais dénote une certaine érudition!
Ce n’est pas un fait historique mais son interprétation par l’église catholique, ou du moins la lecture que cette dernière en fait. Ce qui n’est pas tout à fait la même chose. Et qui dénote certes l’érudition de la dame en question mais un certain degré d’approbation aussi. Si je fais mienne les déclaration du Pape ou d’Hitler, c’est bien que quelque part j’approuve. Si je les divulgue comme vraie et exacte, c’est bien que j’y adhère, au moins sur le point précis cité.
De toute façon être historien ou parler d’histoire c’est réinterpréter les faits
donc quelque part être intoxiqué et pas forcément approuver
un prisme qu’il soit laïc ou dans le domaine des croyances ou de l’étatisme effectue une reformation/déformation des faits
( les deux derniers ressemblant plutôt à des caléidoscopes
car ils poursuivent tous les 2 le but de provoquer l’obédience quitte à manipuler les faits)
Par exemple tout le monde croit que la première constitution européenne fut française
Elle était corse sous Pascal Paoli sic
De même beaucoup de personnes parlent de déluge quand il pleut , même les athées
cela ne veut pas dire qu’ils croient à cette partie de l’évangile
mais que les religions ont également bien « arrangé les faits à leur sauces »
et qu’il reste une empreinte dans l’inconscient collectif .
enfin , correction, le déluge existe dans de nombreuses religions , lol
@carnets d’eros: le fait historique ici est « l’interprétation par l’église catholique » justement, qui éclaire le contexte de l’époque (fait historique encore)…mais on n’a peut-être pas compris la même chose dans le discours de Brigit.
et pour rebondir le commentaire de MarieMouillette, je rentre dans des Eglises, parce que j’aime l’art, l’architecture etc, ça ne fait pas de moi moins une athée, et ne représente pas une approbation du religieux.
@carnets-deros » Pas de généralisation sur « les athées » je vous prie ! Et j’aurais bien aimé que tu nous dises de quelle position tu parles. Je pense que c’est important par rapport au débat que l’on est en train d’avoir.
@mariemouillette » Ta question n’a rien de vache. Je pense que ce qui peut manquer à l’occasion de funérailles, ce n’est pas un cérémonial religieux mais un cérémonial tout court, que les athées ne savent pas forcément inventer.
À l’enterrement de mon père, c’est ce que nous avons fait et c’était magnifique.
J’ai eu l’occasion d’aller à une cérémonie dans une église et j’ai entendu le prêtre tenir des propos d’un autre siècle, ça m’a profondément révolté et n’a fait qu’accentuer mon anti-cléricalisme (pourtant modéré) !
@columbine » J’ai les mêmes questions que toi ! Et puis j’en ai aussi une : pourquoi ça fait plus d’un millénaire qu’on n’a plus vu de messie ?
@brigit » Merci pour toutes ces précisions. Croyance, conviction, certes. Mais le terme de conviction devrait s’employer de la même manière vers ceux que l’on nomme les croyants, non ?
Bon, pour le reste du débat, j’ai un peu décroché, sorry ! Mais n’hésitez pas à poursuivre ! (Voilà bien un domaine où il est assez peu probable de faire changer l’autre de … conviction !)
Si tu es athée, c’est peut-être parce que tu ne sais pas à quel sein te vouer ;) ?
@aurore (toussote…)
Salut CUI, ça fait un bail !
Je n’ai pas grand-chose à apporter sur ce billet, si ce n’est que je trouve dommage, en tant que laïc, de rejeter les croyants comme Mme Bougrab semble le faire. Je suis athée et il me semble que le murmure silencieux que j’ai esquissé lors de ces jours sanglants ressemblait à des prières.
La foi et les valeurs sont 2 choses distinctes, et j’ose espérer qu’on peut aussi être croyant et laïc.
@fiso C’est vrai que ça fait un bail. Je voulais laisser un commentaire sur le billet que tu avais écrit à ce sujet. Et puis j’ai laissé un peu trop le temps passer, mais je te lis avec régularité, ma jeûneuse !
Oui, on peut être croyant et laïc, fort heureusement. Mais les athées sont assez rarement pris en compte par les croyants dans les « rassemblement œcuméniques » visant à l’unité et le respect de tous. Pourquoi ? (une des réponses est : parce que les athées n’ont pas de représentant.)