[295] Jérôme in Paris

Grande première aujourd’hui. Je me suis baladé en vélo dans Paris. Grande première pour moi qui n’avais jusqu’à présent emprunté ma bicyclette uniquement pour mes déplacements de banlieusard. De chez moi à mon bureau (8 mn). De chez moi à chez mon client (de 26 à 34 mn selon mon humeur et la circulation). De chez moi à chez le boulanger (de 3 à 6 mn selon la boulangerie choisie). De chez moi à nulle part, pour le plaisir de prendre l’air (selon l’âge du capitaine).

[Note instantanée pour mesurer le pouvoir d’influence de la burposphère : je suis actuellement dans la brasserie Le Canon des Gobelins(13ème arrondissement) où je viens de commander une pinte. Non seulement la pinte est exactement au même prix que deux demis – les tarifs dégressifs, connais pas (et d’ailleurs je n’ai pas pris deux demis pour des raisons subtiles qui expliquent que je n’aie pas fait le choix de commander deux demis successivement de manière à avoir de la bière fraîche) – mais en plus, la bière servie n’atteignait pas la petite ligne certifiant les 0,5L. C’est donc honteux. J’appelle la burposphère entière (et notamment mes copines de Toulouse) à boycotter cet établissement douteux tant qu’il n’aura pas publié céans des excuses en bonnet difforme.]

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On va finir par le savoir que t’es bi
J’ai donc pédalé de chez moi à la gare (7 mn, juste un peu plus loin que les boulangeries mais plus près que mon bureau), embarqué avec mon vélo dans le train jusqu’à Paris intra-muros et là, j’ai réalisé mon rêve de bobo : rouler en vélo dans Paris. À moi la place de l’Opéra et celle de la Bastille. À moi le boulevard Saint-Marcel et son énoooorme couloir réservé aux bus et aux vélos. À moi les petits couloirs réservés aux seuls vélos où l’on peut allègrement klaxonner ces enculés de piétons non mais ils se croient tout permis ceux-là. Ah ! ah ! ah ! ah ! ah ! So much power !!! Quelques constatations, donc, qu’il m’a semblé important de porter à votre connaissance, amis lecteurs.

  1. D’abord, Paris, c’est nettement plus pollué que la banlieue. À vue de nez (eh eh) y’a pas photo. Paris pue le pot d’échappement. Le port du masque ne paraît donc pas totalement superflu.
  2. Deuxio, les aménagements spécifiques pour les vélos sont plutôt nombreux et commodes. Pour le reste, on fait avec la circulation comme ailleurs.
  3. Ensuite, les piétons ne font absolument pas gaffe aux vélos et ça peut être dangereux. J’ai dû donner plusieurs coups de guidon pour éviter un piéton qui se mettait subitement à traverser juste devant moi en regardant l’autre côté de la voie. Tout ça parce qu’on ne fait (presque) pas de bruit. Non mais oh ! mémé ! ta maman ne t’a pas appris à regarder des deux côtés de la rue avant de traverser ?
    Pour avoir été parisien, alternativement piéton & conducteur, je sais le peu de cas que font, généralement, les uns des autres. Le piéton traverse donc dès qu’il pense que c’est son tour et n’hésite pas à avancer sur les clous (c’est rigolo, « les clous », je me disais que ça aussi c’était un truc que mes enfants ne connaissaient pas, les passages cloutés, et pourtant j’ai bu vu récemment une publicité parisienne pour la sécurité routière, qui utilisait cette expression pour désigner les passages protégés dépourvus de clous depuis Bellelurette [préfet de Paris de 1967 à 1979]) même quand le feu est vert. Genre « je marque mon territoire ». Genre « je gagne 0,08 secondes pour traverser quand ce sera mon tour par rapport à si j’étais resté sur le trottoir. Le cycliste qui, pour des raisons de sécurité, roule fréquemment totalement à droite, doit donc régulièrement les contourner quand ceux-ci ne reculent pas à leur approche. Comportement équivalent chez les voitures : les conducteurs qui avancent sur le passage piéton quand le feu est encore rouge, en donnant des petits coups d’accélérateurs, comme s’ils étaient sur Imola pour démarrer au quart de tour. Généralement des mecs. Fréquemment des taxis. La plupart du temps, au volant de ma 106, je gratte tous ces crétins au démarrage parce que je n’accélère, moi, qu’une seule fois : au bon moment. Ah ! ah ! ah ! ah ! ah ! So much power !!! (oui, je sais, prendre un volant rend un peu con.)
  4. Je ne sais pas si les voitures respectent les vélos mais lors de la première partie de ma ballade (environ une heure), je n’ai eu aucun comportement nuisible à déplorer. J’ai même vécu un moment hallucinant : à un feu, un taxi (oui, oui, un taxi, l’engeance qui généralement considère que la route leur appartient et que le respect du code de la route ne s’impose qu’à autrui), un taxi, donc, m’a aimablement cédé la priorité. J’en suis encore tout ému.
  5. Enfin, il règne à Paris une atmosphère résolument différente de celle de la banlieue. En apercevant dans la rue les Parisiens rentrer du boulot, faire leur courses, rejoindre leur domicile probablement moins confortable qu’un pavillon de banlieue, j’ai été saisi d’une nostalgie et je me suis dit que, définitivement, j’avais envie de retourner vivre au cœur de la ville. Ouais, je confirme : Paris, t’as une gueule d’atmosphère !

* * * 

Quelques petits compléments de notes sur le trajet du retour (Paris-Saint-Germain→C*** en 40 mn seulement) :

  1. Oui, on peut rouler à vélo après avoir abusé de boisson (sacré mélange ce soir : bière puis vin blanc puis vin rouge puis rhum arrangé – légère gueule d’atmosphère le lendemain, NDLA).
  2. C’est assez cool de rouler dans Paris à une heure du matin : très peu de circulation. Le grillage des feux rouges en est facilité.
  3. Euh oui, j’ai toujours mes 12 points de permis pourquoi ?
  4. La place de la Concorde est un sacré tape-cul à traverser en vélocipède.

 

 

[293] Les deux font la paire (de cons)

Entendu ce midi à la radio au journal l’annonce que Claude Allègre ne voterait pas pour Ségolène Royal pour cause d’un « désaccord théorique » sur le nucléaire, les OGM et les cellules souches.

Bon. Deux choses :

  1. Qu’il me cite un seul candidat avec lequel il soit 100% d’accord (pas de chance, lui-même n’est pas candidat).
  2. Quand bien même « ses convictions (…) scientifiques [seraient] plus fortes que toute autre considération » (sic), est-ce que, en homme de gauche, ex-ministre socialiste, il n’aurait pas pu garder son intime conviction pour lui ? Que ses convictions scientifiques arrachent sa décision devant l’urne, je peux après tout l’admettre, mais qu’il se fasse mousser en rendant son choix public, c’est quand même d’une connerie exemplaire.

Le deuxième con, ç’allait être Peillon, mais heureusement que je suis allé chercher sur Yahoo!News l’information liée ci-dessus, parce que j’allais faire un hors-sujet.

Le deuxième con sera donc le journaliste que j’ai entendu à la radio qui a curieusement omis de dire que lorsque Peillon a ensuite déclaré qu’il éprouvait un « vif soulagement », c’était sur le ton de plaisanterie, et qu’en réalité il en était « très triste ».

Parce qu’effectivement, ç’aurait été très con, par fierté, de se réjouir d’une défection dans son camp. 

[292] Pas de boogie-woogie

Le pape a dit

Que l’acte de surfer sur Internet

Sans être marié

Est un péché…¹

Cette nouvelle il me faut l’annoncer

À ma paroisse

Je suis cu[i]ré…


[1] Enfin, ce n’est pas exactement ce qu’il a déclaré, mais en substance, il racontait que trop surfer sur le net ou regarder la télévision² nuisait gravement à la spiritualité et l’élévation de l’âme. Je ne saurais totalement le contredire, mais ajouterais-je que je m’en tape le cocotier ?

[2] Point de mention spéciale sur l’Eurovision ou les allocations radio-télévisées du Chef de l’État.  (C’est beau, une note de bas de page dans la note de bas de page. Je me prends pour Nicholson Baker !)

[291] « Au revoir »

[Pas de panique, je ne ferme pas mon burp !]

J’ai péché, ami lecteur.
Hier soir, j’ai rallumé ma télévision. Bon, ça n’a duré qu’une dizaine de minutes, mais cela suffit à déclencher mon humeur burpeuse.

Nous étions attablés tous les quatre, en famille. en train de manger les pâtes du dimanche soir en écoutant France Inter (un rituel). Maman les p’tits bateaux s’achevait, les filles étaient dans les starting blocks pour scander Le masque et la plume au plus synchrone avec Jérôme Garcin. Sauf que Jacques Chirac avait décidé de perturber notre cérémonial. Quitte à écouter son intervention historique (faut l’dire vite), autant le voir, me dis-je, allumant alors la télévision. C’est ce qu’on appelle joindre l’image à la parole.

medium_mai81.jpgC’était évidemment sans intérêt. Chirac a fait son petit blabla qui se voulait émouvant (à coup de je vous aime même pas avec des trémolos dans la voix, c’était plutôt très molasson, comme Chirac l’est depuis qu’il est Président de la République, comme si le costume continuait, après 12 ans, à le démanger) et évidemment donneur de leçon. Le brave homme, sans rigoler, nous informe qu’après 12 ans de sa présidence qui restera dans les mémoires probablement comme la plus médiocre de l’histoire de la cinquième république, le chemin est tracé. Comment se porte la fracture social, mon gars ? Et merci à TF1 d’avoir fait reculer le sentiment d’insécurité. Chirac m’a surpris, l’espace d’une phrase, quand il a annoncé qu’il aimait la France autant qu’il nous (= les Français) aimait. Je pensais qu’il l’aimait plus que ça.

Après ce discours fade (que les journalistes avaient désamorcé en disant qu’évidemment il allait annoncer qu’il ne se représenterait pas : s’il n’y avait aucun suspens, pourquoi donner de l’importance à ce qui n’en avait de toute évidence pas ? Chirac a tellement déprécié la parole présidentielle qu’il faudrait vraiment qu’il sorte des sentiers battus – ce qu’il ne fait bien sûr pas – pour capter un peu mon attention), les journalistes (pardon, les analystes politiques) meublèrent le vide par 20 minutes de paraphrase molle (pléonasme ?) à grand coup de minutage (« c’est au bout de 3 minutes, il était exactement 20h02, que le Président nous annonça qu’il ne solliciterait pas à nouveau nos suffrages » j’en passe et des pires) et d’intervention téléphonique de Monsieur BVA.

Dans la revue de presse, le lendemain, j’apprenais qu’un corniaud de je-ne-sais-plus-quel journal trouva le moyen d’écrire que Chirac avait prononcé là son plus beau discours. Je suis – hélas – obligé de reconnaître que j’étais d’accord avec Sarkozy (qui se trouvait être l’invité de F.I.) qui annonça que c’était « un peu facile » et que Chirac avait fait deux discours plus grandioses : celui pour la mort de Mitterrand et celui à propos de la rafle du Vél’ d’Hiv’.

Et je suis – hélas – désolé de rappeler à Arnaud Montebourg, qui croyait lire dans les propos de Chirac une idée justifiant l’opposition à Nicolas Sarkozy, que ce n’était pas après avoir pourfendu sans relâche pendant des années les propos chiraquiens qu’il fallait opportunément y trouver aujourd’hui une idée de valeur. Mon cul.

Chirac soutiendra mollement Sarkozy comme Jospin soutient mollement Royal, par sens du devoir politique, et il n’y aura pas lieu de s’en émouvoir.

Comme il n’y a pas lieu de s’émouvoir de la prose engoncée de Mister President hier soir. 

Rideau.


 

P.S. : Ce matin sur France Inter, Caroline Cartier nous a gratifié d’un excellent cru de son Cartier Libre consacré à Jacques Chirac, accolant, notamment,  judicieusement son « refus de tous les extrémismes, racisme(s), antisémitisme(s) » d’hier soir à son « le bruit et l’odeur » de triste mémoire. Hélas, pas de podcast disponible pour ce petit bijou que j’aurais aimé vous faire écouter.

 

[290] Fromage (en faire tout un)

Puisque Volto (autrefois connu sous le nom de Sam) annonce un week-end tartiflette, je le précède d’un chouïa avec ce cliché extraordinaire, saisi par votre reporter de l’impossible (je veux dire : moi).

Fromage prétendument pour tartiflette
Fromage pour Tartiflette « Les Croisés » (marque repère Leclerc)
riche en calcium (et en lipides mais ce n’est pas précisé)

Je n’ai jamais été un grand amateur de fromage. J’en mangeais bébé, puis j’ai décrété que je n’aimais plus ça. La simple vision d’un fil de gruyère (de l’emmental, en fait, faut pas m’la faire) dans les nouilles me provoquait un haut-le-cœur. Je me souviens d’un animateur de colonie de vacances sadique qui voulut, lors d’un pique-nique, me forcer à manger mon sandwich au fromage. J’avais réussi à m’éclipser et j’étais allé l’enterrer. 

Pendant longtemps, sous la seule forme que j’acceptais d’en manger, c’était en gougère (et c’est drôle parce que ma fille aînée suit presque exactement le même parcours que moi). Avec les années qui sont passées, j’ai commencer à aimer le fromage, mais uniquement le fromage insipide (à pâte cuite, forcément, genre Babybel ou Gouda) ou alors cuit : par exemple, j’adore la raclette et j’aime aussi la tartiflette

Alors, tout mauvais Français que je suis (puisque n’aimant pas le camembert ni le roquefort, et ne supportant que le brie servi sous plastique dans les plateaux-repas de British Air Way), mon sang n’a fait qu’un tour et j’ai dégaîné immédiatement mon téléphone-apn pour dénoncer ce scandale quand j’ai vu dans les présentoirs, aux rayons des fromages aseptisés (où, vous l’aurez compris, je m’approvisionne en gouda au cumin, notamment) ce prétendu fromage pour tartiflette. Car la tartiflette se fait avec du reblochon et rien d’autre.

Tout se perd, dans ce pays.


Une autre fois, ami lecteur, je vous raconterai comment j’ai eu un haut-le-cœur et mon sang n’a fait qu’un tour et je me suis dit : « bon sang encore une indignation que je vais m’empresser de faire partager à mon lectorat » en apprenant que Sarkozy avait émis l’idée d’un Ministère de l’immigration et de l’identité nationale. Roïk.

[289] Mon homme (note spéciale journée de la femme)

Le temps passe si vite…

Ce n’est qu’il y a quelques mois (j’aurais dit quelques semaines) que j’ai découvert sur France Inter cette chanson de Valérie Leulliot, Mon homme blessé (co-écrit avec Miossec).

En l’écoutant, je me suis dit qu’il fallait que je la fasse écouter à M*** ; j’avais l’impression qu’on était sur le point de nous quitter, qu’elle racontait un peu notre histoire (ni tout à fait la même, ni tout à fait une autre… c’est en écoutant ce genre d’histoire qu’on réalise combien nos vies sont banales et communes, tout unique qu’on soit).

Je me souviens parfaitement du moment où je l’ai entendu, j’étais en train de rouler avec ma 106, j’allais traverser le pont de la P*** quand j’ai pensé que cette chanson tombait à pic.

Le temps s’est un peu écoulé, je ne suis pas parti, je suis toujours cet homme blessé et je crois à une guérison possible.

Bon, apparemment, mon petit fichier marche po alors je vous propose une autre version mais c’est bien parce que c’est vous.