J’aime bien les filles de La Quête de la Sainte Culotte, j’en ai d’ailleurs déjà parlé ici, et en particulier leur vision d’un féminisme « pro-sexe » (vision partagée à des degrés divers – tant il est vrai qu’il y a presque autant de féminismes que de féministes – par nombre de mes amantes, ce qui montre une certaine cohérence dans mes choix électifs) ; on avait même un projet d’article à quatre (ou six) mains, hélas resté à l’état de projet dans un carton recouvert de poussière et de toile d’araignée.
Il y a aussi chez elles des points d’intérêt qu’elles développent et qui ne me passionnent pas, moi ; par exemple la « culture porn » (même si j’en participe moi-même avec ce burp).
Et puis parfois, on n’est pas d’accord.
Après un débat sur Twitter où chacun campait sur ses positions, j’ai souhaité développer mes arguments dans une note en espérant, au mieux, ouvrir une brèche dans les convictions de mon opposante (je pense que c’est Sophie mais ça pourrait être Louise !), au pire, éviter de tenir des propos trop lapidaires1 ou caricaturaux comme Twitter nous y encourage avec son format court.
Aux chiottes le micro-blogging, vive le macro !
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Tout a commencé par ce tweet (que j’essaye de reproduire ci-dessous) :
The Holy Culotte
@TheHolyCulotteFrance’s feminists are colluding in oppression by supporting headscarf ban http://gu.com/p/4azjn/stw
Le lien renvoi à un article du Guardian – journal centre gauche –, titrant sobrement « Feminists are failing Muslim women by supporting racist French laws » et déclarant, en gros, que les lois françaises contre le port du voile sont des lois racistes et que les féministes français qui les défendent se trompent de combat car ce sont des lois qui, sous couvert de libérer la femme du joug de l’oppression, ne font que les contraindre plus encore au lieu de les libérer.
C’est un point de vue.
Que je ne partage pas. J’ai donc réagi :
C’est un débat qui divise, et il y a aussi des tas de femmes d’origine musulmane qui détestent le voile.
De ces années marocaines, elle a gardé le sentiment d’une profonde injustice dans les relations hommes-femmes. Elle a «mal au cœur» en pensant aux femmes voilées.
CUI : Quand je vois un gars en jogging qui se balade avec sa femme en niqab, je ne vois pas en quoi il y a racisme à trouver ça offensant pour la femme.
(Notez qu’il faut déjà deux tweets pour énoncer l’opinion ci-dessus, c’est dire comme Twitter est adapté au débat.)
La réponse en trois tweets :
THC : Elle a le droit de se promener en niquab comme moi j’ai le droit de me trimballer en mini short.
Le problème est que – sous prétexte d’interdire le voile – on leur interdit les lieux publics comme les universités par exemple.
Et pour finir : personne n’a à imposer une tenue à une femme. Si elle choisit de porter le niqab, qu’on la laisse tranquille.
Pour prendre un exemple qui te parlera plus : certains jugent la porno comme offensante pour la femme. Doit-on interdire la porno ?
Le débat se poursuit :
CUI : D’accord avec toi sur ce que tu énonces mais tu oublies un élément de poids qui est le consentement : qui choisit, qui impose ? Pour quelques femmes qui revendiquent le port, combien le subissent ?
Il y a un débat similaire avec la prostitution : faut-il l’abolir au prétexte que la majorité des prostituées sont des victimes ? Le fait est qu’il y a des lois contre les proxénètes.
Ici mon argumentaire est un peu flottant ; je voulais dire en gros qu’il n’y avait pas de loi qui permettait facilement d’interdire un mari, par exemple, à imposer à sa femme sa tenue vestimentaire. Bref, que cette loi anti-voile pouvait être, d’une certaine manière, une protection pour les femmes à qui l’on imposait quelque chose dont elles pouvaient se défaire sous certaines conditions.
THC : (ici un tweet qu’elle a dû supprimer parce que je ne le retrouve pas mais qui me demandait en gros si j’étais pour l’abolition de la prostitution)
CUI : Non, mais je suis pour le combat contre le proxénétisme.
Et le jour où les femmes seront libres de se voiler ou pas, on en reparlera. Mais il ne faut pas se voiler les yeux (!) sur la réalité du port du voile.THC : mais on ne connaît pas la réalité sur le port du voile !
De plus, les lois sont CONTRE les femmes portant le voile. C’est hypocrite.
Et qui te dit qu’elles ne sont pas libres dans leur couple de porter le voile ?CUI : Je suis convaincu que la majorité le font par tradition ou sous la contrainte (du regard social) mais bien sûr parfois consenti.
Tu ne vois pas l’intérêt pour les femmes à lutter contre le port du voile ?
Tu ne vois pas en quoi le niqab (qui n’est qu’une extension du voile) ou la burqa sont des offenses faites aux femmes ?THC : Mais qui es tu pour mieux savoir qu’une concernée comment elle doit s’habiller ?
(ma question n’est pas méchante, juste te faire prendre conscience que tu penses mieux savoir que les personnes dont on parle)
Je dis juste qu’un avis exprimé n’est pas représentatif d’une réalité globale, et par ailleurs, oui, un certain nombre de faits me laisse à penser que cette réalité n’a rien de rose (je me suis donc forgé une opinion sur la base de faits, comme 1/ le fait que certains pays islamiques imposent le port du voile de manière législative 2/ les couples que j’observe dans la rue, au supermarché, etc. et le fait que, majoritairement, la pudeur qui s’imposerait tout autant aux hommes selon les textes – voir un des articles cités par THC – semble s’imposer à sens unique contre les femmes, ce qui justifie à mes yeux le combat féministe anti-voile).
THC : la liberté n’est elle pas de prendre ses propres décisions ?
En imposant le non port du voile, on fait la même chose que celles/ceux imposant le port du voile.
Tout en invisibilisant celles ayant fait le choix de le porter
Je n’ai pas a décider à la place des autres comment il/elles doivent vivre leur féminisme et/ou leur foi.CUI : La loi est là pour réguler l’espace social.
Bon, c’est trop long tout ce que j’ai à dire, je ferai une note débat :)
En gros : ça n’est pas le port du voile qui est interdit, c’est le port du voile dans certains espaces publics, en particulier les lieux d’enseignement publics (laïques) et les administrations. Et Dieu – s’il existe – comprendra très bien que la femme qui porte le voile en signe d’humilité se plie momentanément aux lois humaines.
THC : je te renvoie aux articles que je viens de tweeter. J’ai déjà trop pris la place des concerné•e•s dans cette discussion.
Alors ici je développe un peu : non, effectivement, je ne suis pas personnellement capable de dire quelles pressions s’exercent ou pas dans l’espace social / familial qui fait que les femmes portent le voile ou pas. Mais si on peut trouver des témoignages de femmes qui revendiquent le port du voile, on en trouve aussi pour dénoncer la pression qui est faite aux femmes sur leur tenue vestimentaire. Bref, ça n’est pas tout blanc ou tout noir et c’est pourquoi c’est un débat complexe et qu’il ne faut surtout pas le simplifier. Et puis là où THC parle du voile de manière générique, moi je fais une fixette sur le niqab parce que, franchement, quand je vois une femme qui le porte, mon cerveau d’occidental ne peut pas admettre qu’elle le fait vraiment librement. Et en outre, il y a quelques pays musulmans qui imposent le port du voile à toutes les femmes, musulmanes ou pas, et que ça ne peut pas disparaître de l’équation, surtout quand on reproche, en gros, aux « occidentaux » d’imposer leur vision occidentale aux femmes qui ont librement choisi de porter un symbole d’humilité devant Dieu. Mon cul ! Faut juste regarder dans la rue comment sont fringués les mecs qui accompagnent les femmes voilées. Je ne parle pas d’un simple voile, hein. Je parle de trucs qui couvrent bien et qui sont censés protéger de la concupiscence des hommes. J’ai vraiment du mal à comprendre comment, en tant que féministe, on peut balayer d’un revers de la main ces situations au prétexte que quelques femmes expriment combien cette loi française les brime.
Moi je veux bien que les femmes musulmanes se voilent pour faire plaisir à Dieu, ou que les femmes juives se rasent le crâne et porte une perruque pour complaire à Yahvé ; mais primo, je considère qu’elles ne le font pas dans la majorité des cas aussi librement que celles qui s’expriment publiquement dans la revendication de leur foi, et deuzio, moi aussi j’exprime mon opinion d’athée qui considère que ces religions du livre ont été écrits par des hommes qui ne donnaient pas la part belles aux femmes (impures, inspiratrices de péché, etc.).
CUI : La loi interdit de faire quelque chose dans l’espace public. C’est discutable mais tu peux voir ça comme une protection.
À un moment, un autre twittos a participé au débat :
Texte intéressant, mais pas exempt de points contestables. Sur laïcité et histoire chrétienne de la Fr. par ex.
Réponse :
THC : n’étant pas concernée par le port du voile, mon but est surtout de laisser la paroles à celles vivant la situation :)
(Si je puis me permettre, ça n’est pas ce que fait l’article de The Guardian.)
Réponse pertinente de notre pénaliste :
Avocassette : On peut fort heureusement avoir un avis sur les sujets qui ne nous « concernent » pas au sens où vous l’entendez.
THC : Oui et non : on peut aussi laisser la place aux concerné.e.s quand c’est possible :)
Avocassette : L’un n’empêche pas l’autre. Et la critique (respectueuse) est le pendant de la prise de position publique.
THC : Il est toujours plus facile de prendre la parole quand on n’est pas concerné.e.s.
J’ai déjà suffisamment pris la parole dans ce fil. C’est pk je préfère maintenant laisser la parole aux concerné.e.s
Ici s’exprime, je crois, un point de divergence majeur : T.H.C. envisage la loi uniquement sous un angle de privation de liberté individuelle (et considère donc sa propre parole – et la nôtre – comme non légitime puisque ne venant pas de femmes voilées) alors que je considère que la loi concerne la société tout entière. Pourquoi interdit-on aux femmes le port du voile dans l’Université ? Quel était la volonté du législateur ? Et pourquoi certaines féministes françaises comme Élisabeth Badinter s’attaquent, elles aussi, au port du voile ?
J’objectais (de façon un peu péremptoire) :
CUI : Hélas tu confonds la partie et le tout ou plutôt tu prends une prise de position comme une vérité inattaquable.
THC : J’ai déjà suffisamment pris la parole dans ce fil. Je n’ai pas à parler à la place des concerné.e.s.
Je ne peux pas comprendre tous les enjeux du port du voile.
Je suis pour la liberté d’habillement. Je n’ai pas à me prononcer sur le reste.
Oui, moi aussi, dans le principe, je suis pour la liberté d’habillement, mais je comprends que, dans certaines circonstances, la loi régule pour ce qu’elle considère (à tort ou à raison, là il peut y avoir débat) nécessaire pour le bien collectif et la cohésion de la société.
Voyant que je n’aboutis pas sur ce sujet, je relance T.H.C. sur le point qu’elle évite depuis le début et qui me semble le point crucial :
CUI : Soit. Mais je te demande de parler en ton nom : que ressens-tu, toi, quand tu croisés une femme en voile intégral ? Rien ?
THC : Quel intérêt ? L’important est son ressenti à elle. On en a rien à faire de ce que je pense d’un truc qui ne me concerne pas.
CUI : On peut s’indigner contre l’excision sans être excisée. Je ne crois pas que la majorité des femmes qui portent la burqa le fasse LIBREMENT et je ne comprends pas que tu fasses l’impasse sur ce point au prétexte que certaines le fasse librement.
THC : tu ne crois pas => en somme tu n’en sais rien2 . Tu te places en tant qu’homme sachant mieux qu’elles ce qui est bon ou pas. C’est une injonction.
Je suis contre les injonctions faites sur le corps DES AUTRES. Chacun fait ce qu’il veut de SON corps. Point barre.CUI : Non.
L’espace public restreint ta liberté et c’est normal.
Tu ne peux pas te balader en maillot de bain dans certaines villes3
Tu n’as pas le droit de te balader nu.
Aussi, la loi française n’interdit pas le voile, elle l’interdit dans certaines circonstances.THC : Parce que l’occident a une conception taboue de la nudité. Comme l’occident a une conception de la femme en burqa soumise à son mari.
Les gens peuvent se balader nus. J’m’en moque.
Mais sous principe de décence, ils ne peuvent pas. Pareil pour la burqa ?CUI : C’est au nom du relativisme culturel que certains défendent l’excision !
Fuck le relativisme culturel !THC : non mais là tu parles d’une mutilation sur AUTRUI. Moi je te parle d’un choix sur SON PROPRE corps.
Faudrait pas tout confondre.
Je ne confonds pas du tout. Je dis juste que l’argument « l’Occident a tort » est merdique.
THC : As tu au moins pris la peine de lire les articles où je t’ai cc ?
Il y a le point « comparaison excision / voile ».CUI : Non, mais maintenant que je suis posé chez moi avec un ordi, je comptais le faire !
#JYVaisDeCePas(Plus tard…)
Voilà, j’ai lu et (étonnamment) je ne suis pas d’accord !
Je vais donc faire une petite note vite fait parce que j’ai du mal à développer mes propos avec la concision imposée par Twitter (il y a même un de mes tweets que je regrette d’avoir écrit car caricatural et simplifiant ta pensée — sorry for that).
Bon, alors pas si petite que ça, la note.
Les articles en question sont les suivants :
- Mon voile, ma liberté : mon slam et mes explications : pas grand chose à dire ici à part que c’est un peu gnangnan et que, surtout, ça n’est qu’un témoignage individuel.
Bon, ça serait aussi intéressant de discuter de comment la loi française sur le port du voile permet à des personnes effectivement racistes et/ou islamophobes de se sentir justifiées dans leurs opinions nauséabondes, mais ce n’est pas l’axe du débat ici qui porte sur le féminisme et voile.
Encore une fois, je me fous pas mal du port du voile quand il est discret, comme je me fous du port d’une kippa, d’un chapeau, d’une croix en pendentif, etc. Mais je ne m’habitue pas à voir une femme en niqab (et j’avoue que j’ai un peu de mal avec les voiles très couvrants aussi). - Féministes mais anti-voile : un argumentaire à l’usage du féminisme non-excluant (écrit par une femme qui précise être blanche et non-croyante, donc pas plus légitime à s’exprimer ici que moi, selon THC – en réalité, tout aussi légitime, bien évidemment).
Là, comme c’est un argumentaire, je vais prendre les points un par un :- D’accord avec le point 1. On peut sans doute être féministe et porter le voile (le discours féministe ne m’a pas frappé dans l’article précédent, mais je ne ferai pas de cet exemple une généralité).
- Pas d’accord avec le point 2. Par exemple, comment peut-on mettre sur le même plan une prescription faite à l’ensemble des femmes (nubiles) et une prescription limité aux dignitaires (ah ah ! uniquement des hommes chez les cathos et chez les musulmans, soit dit en passant). Aussi, selon l’auteure, les textes chrétiens sont les plus rétrogrades… Bien évidemment, si on les sélectionne soigneusement, on pourra démontrer ça… ou le contraire. Dans le nouveau testament, Jésus et la femme adultère : « Que celui qui n’a jamais péché me jette la première pierre ». Quelle est la religion d’état dans les pays où l’on lapide encore au XXIe siècle des femmes adultères ?
« Enfin, il est utile de souligner que le voile est de fait un code vestimentaire très culturel, détaché historiquement de la religion musulmane. » dit encore l’auteure. Ben voyons ! C’est exactement ce genre de discours qui justifient l’excision. Allez, c’est une tradition millénaire ! Arrêtons un peu avec notre vision d’occident. Au fait. Qu’est-ce qu’on fait aux femmes qui contreviennent à notre méchante loi de français racistes ? On les lapide ? On les fout en tôle ? Euh… Ah non, une amende de 150 € (je parle ici de la loi n° 2010-1192 du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public, loi validée par la Cour européenne des droits de l’homme qui a estimé dans un arrêt que « la préservation des conditions du “vivre ensemble” était un objectif légitime » des autorités françaises). - Point 3 : euh… certes… mais je ne vois pas en quoi l’auteure démontrerait qu’être contre le port du niqab (qui n’est pas une prescription du Coran) serait, a contrario, de l’islamophobie. Par ailleurs, j’oppose à son argumentaire du « racisme intériorisé » (qui existe certainement) l’argumentaire de la « culpabilité de l’occident colonisateur » qui ferait oublier, en expiation de nos péchés de colons, le fait qu’on défend des putains de valeurs universelles et qu’on a bien de la chance, en France, de pouvoir exprimer son amour du voile, alors que dans d’autres pays, on ne jouit pas de la même liberté pour défendre, par exemple, son athéisme. Alors fuck le relativisme culturel ! Quand chacun sera vraiment libre d’afficher comme il l’entend sa foi ou son absence de foi, on verra bien comment il sera de bon ton d’adapter les lois et les combats féministes.
- Point 4 : pas d’accord. « Tout d’abord, comparer des contextes complètement différents tels que le contexte français et le contexte iranien n’a aucun sens ». Ben si, quand même, défendre des valeurs universelles comme la liberté de croyance, ça me paraît un bon combat. Ne pas voir la connexion qui peut exister entre l’obligation (législative) de porter le voile (dans certains pays islamiques) et l’obligation (morale) de le porter pour les femmes musulmanes, c’est purement de l’aveuglement.
- Point 5 : Je suis d’accord pour dire que mettre sur le même plan voile et excision tient lieu d’un point Godwin dans ce débat (je précise d’ailleurs que ce n’est pas ce que j’ai fait : j’ai juste indiqué que le recours à l’argument selon lequel « nous, occidentaux, ne pouvons pas comprendre les traditions des autres » servait à justifier l’intolérable). Pour le reste, pas d’accord mais en précisant que je ne considère pas le voile (« modeste ») comme une violence faite aux femmes mais le niqab (ou les voiles trop couvrant) car ils stigmatisent la femme comme source de concupiscence chez l’homme.
Mais bordel, THC, tu déconnes complètement en considérant que c’est un mauvais combat féministe alors que tu revendiques le port libre du mini-short. Va voir Mustang ! Pour une femme libre de se voiler, combien de femmes non-libres de se dévoiler ??? Mettons les combats dans leur ordre d’importance !!! - Conclusion : oui, moi je suis intolérant à certaines interprétations (car, comme le dit l’auteure de l’article, il s’agit bien d’interprétations) du Coran (ou de n’importe quel autre Livre) qui ostracisent et asservissent la femme.
REP A SA, THC !
- Et il ne faut pas jeter la pierre à la femme adultère, je suis derrière.↩
- Euh désolé, mais là, c’est un procédé rhétorique visant à annuler les propos de l’autre, c’est un peu malhonnête, NDLR↩
- Par arrêté municipal. C’est assez con, comme loi, mais ça existe. Y aussi des gars qui se sont faits licencier parce qu’ils portaient des bermudas au boulot. Enfin bref, la liberté individuelle, c’est louable – et je la défends, évidemment – mais elle ne justifie pas tout et surtout pas de « point barre ».↩
C’est un sujet aussi intéressant que complexe. J’admets que Twitter n’est pas du tout, mais pas du tout, propice au débat et je trouve ça très bien que tu t’exprimes ici sur un sujet qui te concerne et nous concerne tous !
Parler du choix volontaire de porter une burqa est très subjectif, tout comme celui du mini-short. L’habillement est loin d’être un choix à moins d’être isolé dans le trou du cul des Alpes. Il y a des codes de sociétés, des normes des « lois » non-dites et les musulmanes d’orient, de France et même nous n’échappons pas à cette « obligation » consentie.
Pour ce qui est de parler au nom ou non, ou à la place des concerné.e.s, je ne comprends pas vraiment… Je considère que tout le monde à le droit de traiter un sujet qu’il ait un pied dedans ou non, de plus ce débat est (a priori) français donc en tant que citoyenne française, je me sens concernée et je pense avoir légitimement le droit de prendre la parole.
Je ne tiens pas forcément à me prononcer sur le port du voile ou autre mais l’État a (évidemment) le droit et le devoir de légiférer sur la chose, si c’est dans l’intérêt commun ou au nom de l’ordre public. Les vaccins obligatoires, les transfusions imposées en cas de danger sont des atteintes à la liberté du corps, même si cela semble évident ici, pourquoi est-il si compliqué de ne pas comprendre les interdictions du port du voile ? L’État, ce vilain petit canard, veille à l’ordre public et je rappelle que c’est une de ses premières mission (pas simple!).
Il est vrai que les gens acceptent mieux l’interdiction d’être à poil dans la rue ou encore l’interdiction de porter des mini jupes ou short dans certaines entreprises alors pourquoi est-ce différent avec les signes religieux?
Enfin, tamponner le sujet du voile comme de « féministe » a un peu tendance à m’iriser le poil… D’autant plus que si on se place comme l’État, interdire le port du voile est féministe car cela se fait dans le soucis de redonner un droit au femme.
Encore une fois, je ne me prononce ni en faveur, ni contre le port du voile, je préfère parler de la place de l’État et de ses obligations.
Belle journée à vous, je vais profiter de mon premier jour de vacances !
j’adhère totalement au commentaire de Lilou. (et pourtant je viens du trou du cul des Alpes ^_^)
C’est se voiler la face de croire que c’est si simple d’être libre de porter ce que l’on porte, et même pour les minis shorts. C’est simple de le croire quand on le vit mais on est très peu à décider librement de ce que l’on veut – peut ou pas assumer.
Pour la liberté de notre sexualité c’est un peu pareil. Il faut faire attention de ne pas croire que ce que l’on peut vivre est si simple que ça à vivre pour tout le monde, juste parce qu’on dit » aimez vous librement » .
comme de dire » je suis pour la liberté de vêtement »… point barre. si c’est simple pour moi, c’est simple pour tout le monde.
Je ne suis pas abonnée à Twitter. mais qu’est ce que ça doit être compliqué de se limiter en mots et de se comprendre !!! Ils auraient plutôt dû inventer une plate forme où- le nombre de lettre a un minimum de tant de caractère pour nous obliger à argumenter et à développer nos idées. twitter cherche-t-il à nous réduire ? ;)
@lilou Tu as parfaitement raison, (avec @dita ) de rappeler que nous ne sommes pas si libre que ça du choix de nos vêtements, mais on doit quand même faire le distinguo entre ce qui est du ressort de la censure (auto-censure, ou censure sociale) et ce qui est du ressort de l’interdiction légale.
Pour resituer la loi actuelle en France (je ne suis pas un spécialiste), il faut distinguer l’interdiction de la dissimulation du visage dans l’espace public (par exemple, pas le droit de se promener en cagoule sur les Champs Élysées) et l’interdiction des signes religieux ostentatoires dans l’administration et en particulier l’enseignement.
Tu dis être irritée que l’on qualifie de féministe le sujet du port du voile, mais ça n’est pas exactement ce qui est dit. En fait, cet article vise à préciser mon opinion sur la loi au travers du prisme du féminisme.
En fait, s’affronte ici la théorie de THC (quel dommage qu’elle n’intervienne pas ici et se limite à la pensée raccourcie de Twitter) qui dit que cette loi est anti-féministe parce qu’elle limite la liberté de choix des femmes (de s’habiller comme elles le souhaitent / de vivre leur foi comme elles le souhaitent). En fait, la loi a été écrite de façon un peu plus subtile et « unisexe » mais on ne peut pas nier que, concrètement, la femme qui veut se voiler se trouve dans l’interdiction de le faire dans certaines conditions (et j’insiste lourdement sur ce point, parce que le port du voile n’est pas interdit par cette loi).
L’autre sujet, qui dépasse un peu le cadre strict de la loi, est : les féministes français-es (comme E. Badinter) qui s’opposent (dans le cadre de l’expression de leur opinion – il ne s’agit pas de loi) au port du voile parce qu’ils/elles prétendent que le voile abaissent la femme font-ils/elles fausse route en voulant imposer une vision blanche/occidentale au monde. Et sur ce sujet, je les rejoins (encore une fois, juste un foulard, ça ne me dérange pas, ce qui me choque, ce sont les tenues très couvrantes) et hélas, sur ce sujet, THC ne se prononce pas avec un argumentaire avec lequel je suis en désaccord, et je pense qu’il faut soit de l’aveuglement, soit de la mauvaise foi, pour prétendre que le droit pour une femme à porter un mini-short ou le droit pour une femme à porter un niqab, c’est kif-kif.
Sur ce point « D’autant plus que si on se place comme l’État, interdire le port du voile est féministe car cela se fait dans le soucis de redonner un droit au femme », il faudrait que tu précises ta pensée parce que la corrélation n’est pas immédiate.
Profite bien de tes vacances !
@dita J’ajoute juste pour te répondre, un point sur Twitter : non, Twitter ne cherche pas à nous réduire, il offre un média et libre à chacun de l’accepter. Mais le fait que ça soit du « micro-blogging » favorise certainement son succès. C’est plus facile pour tout le monde d’asséner « sa vérité » en un petit coup de cuillère à Tweet et de rester en compagnie de ceux qui pensent (grosso modo) comme nous (ce que je fais moi-même, hein, je ne me sors pas du lot).
Sujet délicat que ce voile… Je l’analyse sous un angle très personnel mais aussi professionnel (je suis fonctionnaire et donc j’exerce dans un espace public où on ne doit pas dissimuler son visage (c’est ce que dit la loi).
Dans le cadre de mon travail, et il m’est arrivée une seule fois de demander à… un homme qui portait son casque de moto de l’enlever, ce qu’il a fait de suite ! Les femmes voilées ne posent aucun problème, mais celles qui portent le niqab par exemple doivent découvrir leurs visages pour que l’on puisse comparer leur visage avec la pièce d’identité qu’elles produisent. Cela ne m’est jamais arrivée mais la loi (et les instructions données) sont très claires sur ce point. Et je trouve cela tout à fait normal du fait que nous vivons dans un État laïque. Comme je trouve normal d’exclure tout port de signe ostentatoire dans un établissement d’enseignement. De fait la loi n’interdit pas de porter le voile mais pose des conditions à son port dans certains espaces en vertu du fameux principe de laïcité cher à notre République.
Ensuite, je suis profondément convaincue que le port du voile est un signe d’inégalité entre l’homme et la femme. Je me souviens encore du jour où j’ai visité une mosquée en Syrie (avant que ce pays ne soit en guerre) : toutes les femmes du groupe ont du enfiler une sorte de grande cape noire et se couvrir la tête avec la capuche intégrée. Nous avons donc marché ainsi tels de grands corbeaux noirs tandis que les hommes déambulaient à nos côtés en pantalon ou short et t-shirt manches courtes ! Quelle hypocrisie ! Cela dit il m’est difficile de me mettre à la place de ces femmes qui portent le voile. Choix ou contrainte ? Cela me fait penser à mon histoire familiale : mes grands-parents, orphelins très jeunes, ont été élevés par les sœurs à l’orphelinat (où ils se sont rencontrés). Même éducation donc. Mes grands parents en sortis athées et anti-cléricaux tandis que ma tante (sœur de ma grand-mère) est rentrée dans les ordres… J’ai toujours entendu dire ma grand-mère qu’elle avait été « embrigadée » !
La pression est grande dans beaucoup de pays sur les femmes pour porter le voile, et nous devons poser chez nous les limites que nous impose le principe de laïcité. Et aussi un peu pour ces femmes qui luttent dans le monde entier pour se libérer du voile.
@mnemosyne Totalement en phase avec ton commentaire ! Merci pour cet éclairage « de l’intérieur » (même si ce n’est pas un témoignage de femme musulmane).
Je suis un peu triste de te contredire cher CUI, mais je suis d’accord avec les filles de THC sur ce point.
D’une part, la réponse que tu donnes au 1er article recommandé me déconcerte. Il ressemble un peu à ce que dit Badinter, c’est-à-dire que ça la gêne de devoir évoluer dans le même espace qu’une femme en foulard/niqab. C’est un argument complètement égocentrique, parce que chacun peut avoir un avis sur les autres sans que cet avis intervienne dans leur liberté d’agir sur leur propre corps. Par exemple cela pourrait me gêner de voir une fille menée en laisse dans la rue. Est-ce que je devrais me sentir offensée et le lui faire savoir ? Repérer des policiers et leur annoncer qu’une femme se fait maltraiter ? Vouloir la secourir et devoir entendre de façon gênée que c’est son choix, son fétiche, et de quoi je me mêle ? Mon interprétation de la scène et la sienne divergent largement…
D’autre part, mettons-nous un peu à la place de ces femmes qui sont forcées de porter le foulard. D’une part, une personne mâle qui ne partage pas son expérience de femme lui dit qu’il faut qu’elle le porte. D’autre part, un état aux tendances religieuses éloignées des siennes lui dit qu’il ne faut pas qu’elle en porte. En gros, dans les deux cas des individus qui ne partagent en rien sa situation lui demandent d’alterner son apparence pour leur plaire à eux, pour coller le plus possible à leur idéal inatteignable, que ce soit d’idéaux dits « universels » d’une part (bonjour la vision colonialiste qui pense que seul son système est bon!), d’idéaux dits « religieux » d’autre part.
Je pense que malgré quelques images médiatiques très choquantes de l’islamisme, la plupart des femmes musulmanes vivant en France prennent de plus en plus le contrôle de leur vie (celles que je côtoie en tout cas). Si on risque un jour de laisser tomber (dans le monde occidental) cette interprétation absurde du Coran, ce serait dommage qu’on garde une loi tout aussi absurde…
Bonjour,
Il y a bien longtemps que je n’étais pas venu ici, pour lire et gazouiller.
Vous lirez avec intérêt cet article du Monde Diplomatique de ce mois-ci (Août 2015) « Femmes arabes dans le piège des images ». Il est écrit par Sahar Khalifa, féministe et romancière palestinienne.
Elle y fait le constat que, trop souvent, en particulier dans les médias (mais que peut-on attendre de bon dans les médias ?) les femmes arabes sont enfermés dans des images et des représentations réductrices d’être de second plan sans formation ni compétence. Or, il existe aussi des combats féministes arabes. Ils sont peu connus et évidement différents de ceux qui peuvent exister en Europe.
C’est en page 3. A lire à l’ombre, dans un coin tranquille qui permet deux sous de réflexion !
CdE
@fay-grim Ne sois pas désolée de me porter la contradiction, au contraire ! Cet article était là pour susciter le débat et je ne peux que regretter que THC se soit limitée à dialoguer sur Twitter à coup de missives alors que j’avais essayer de porter le débat dans un espace où l’expression était moins contrainte (et possiblement moins publique, mais je ne crois pas que la foule soit le bon endroit pour débattre vraiment !).
Bref !
D’ailleurs, je ne ressens pas tant de décalage entre ce que tu dis et ce que je ressens. Quand je croise une femme en niqab, je suis mal à l’aise, mais j’en reste là. Je ne vais pas la dénoncer, je ne vais pas l’agresser ni même la dévisager ; juste, je suis mis mal à l’aise par cette vision de la femme et c’est pire quand je vois son mec en jogging à côté. Je le juge, oui ! Tout comme tu pourrais être mal à l’aise, dis-tu, en voyant une femme en laisse.
Et je ne trouve pas encore d’argument qui me permette de penser différemment et de mettre de côté ce malaise qui est le mien.
Quant à la loi, qu’elle évolue avec le temps, c’est la règle !
@carnets-deros Merci pour la référence ; je verrai si je trouve ça à mon retour en France !
je n’ai pas tout lu parce que bon… c’est long et il fait chaud ! j’y reviendrai, promis !
j’avoue qu’il est difficile de ne pas être en contradiction, en plein paradoxe, comme souvent dans la cause féministe, entre « mais laissez les vivre sans leur dicter quoi que ce soit ! elles ont le droit de s’habiller comme elles veulent » et « faut quand même protéger les gens malgré eux, la loi s’est fait pour ça »
(j’avoue aussi que j’ai la même contradiction vis-à-vis de la prostitution MAIS là où je ne suis pas d’accord avec vous, c’est qu’on ne peut pas lier les deux sujets ou alors va falloir creuser un peu plus profond que par tweet !)
ce que les féministes oublient (un peu vite) en assimilant nos loi à des lois racistes et sexistes, au-delà de la liberté d’une femme de porter ou non le voile, ou une jupe plus ou moins longue, c’est l’origine de ces lois (attitudes dans les hopitaux et les écoles, e.g. vis à vis des soignants hommes ou des enseignements « non respectueux ou conformes »).
un non-débat que l’on ne peut épuiser.
c’est le paradoxe de la tolérance (ou de la liberté) de Karl Popper : à tout tolérer, y compris l’intolérance, on met en danger la tolérance elle-même, la liberté, et on fait le jeu de l’intolérance. on doit donc déclarer l’intolérance illégale et criminelle. La tolérance absolue (ou la liberté absolue) ne peut donc exister. L’intérêt du paradoxe de Popper, c’est qu’il place le droit comme rempart. car on trouve aussi la critique de ce paradoxe
mais au moins il ancre le débat : il faut donc prendre la responsabilité de légiférer, donc d’être dans un état de droit. quitte à se facher avec les unes (féministes) et les autres (traditionalistes et/ou religieux, ou néo-traditionalistes, ceux qui ré-inventent les traditions).
pas n’import quel état de droit, ni le libéralisme ni le droit religieux. notre choix de société, c’est le vivre ensemble, pas à coté (comme cela est le cas aux Etats-Unis, faux melting pot qui prétend nous donner des leçons de liberté absolue ou au Royaume Uni qui maintient le système de privilèges et de classes, voire de castes… et donc s’accommode très bien des traditions ostracisantes et des signes visibles d’appartenance à une communauté, religieuse ou non. communauté, tradition et religion n’étant pas assimilables)
ce vivre ensemble impose ici que dans l’espace public on ne cache pas son visage d’une part et on reste modéré sur son mode de vie, de façon à ne pas indisposer/choquer l’autre. quitte à être en contradiction permanente, à afficher une nudité commerciale et artistique autant que des normes sécuritaires
ce qui s’impose donc aussi aux naturistes, aux fétichistes et autres amateurs de dress code ou de totale liberté vestimentaire.
pas évident à accepter. surtout si personnellement, j’ai beaucoup de difficulté avec le « rester modéré » et je préfère l’extravagance, le hors norme…
@brigit Merci de ce commentaire, éclairé et inspirant comme souvent ! Certainement, notre société n’en est pas à une contradiction et nos lois sont loin d’être parfaites. Et le discours féministe est, lui aussi, ambivalent ; la preuve en est tout simplement, sur le débat autour du voile, le fait qu’il y a des féministes pro et des féministes contre.
Le débat me passionne et me paraît fondamental.
La loi interdisant le port de vêtements qui masquent le visage me parait fondée par un principe de sécurité justifié.
Je regrette cependant que certains métiers et statuts soient fermés aux filles/femmes qui souhaitent porter quelque chose sur la tête ainsi que des vêtements amples et longs.
Une pièce de théâtre « les monologues voilés » décrivait les sentiments, désirs et expériences de femmes portant ces vêtements. Très semblables à mes ressentis de femme occidentale, avec une once de liberté supplémentaire: liberté de posture (nous avons intégré le « jambes serrées » depuis que nos jupes ont raccourci et que les pantalons nous sont accessibles) et à certains égards, une forme de séduction entre hommes et femmes où les standards de beauté imposés par les pubs et la magazines sont bien moins une entrave à la rencontre.
Cela m’avait fait réfléchir…
@josette Oui, il n’y a sans doute pas lieu d’avoir des positions trop radicales dans un sens ou dans l’autre et je veux bien croire que, dans certaines proportions, le voile puisse avoir des effets bénéfiques dans les rapports hommes-femmes, mais franchement, je pense que c’est hélas l’exception plutôt que la règle. Une fois la phase de séduction passée, je vois vraiment plus le voile comme une cage qu’autre chose.