[1302] Les lectures – la contribution de Thomas

Carnevale - Gérard Dubois - une femme allongée sur le flanc, sur ses fesses pointées vers notre regard, un masque de carnaval

Regarde. Elles sont venues. Elles sont là, belles, prêtes, terriblement troublées de ce qui va suivre.
Regarde bien, regarde ces yeux brillants tournés vers toi ; il y a quelques sourires gourmands, d’autres plus rêveurs, l’un d’eux est invisible, mais tu peux deviner qu’il se dessine malicieusement derrière son masque.
Écoute aussi, écoute ces respirations, ces souffles qui trahissent imperceptiblement l’émoi, l’attente chargée d’envies, qui se contiennent encore. Écoute les corps, les frottements, les mouvements qui chuintent ou qui crissent doucement.
Oh, et puis touche : caresse le cuir, le nylon, laisse ta main cheminer, palper le contraste entre le tissu et la peau ; apprécie les ouvertures qui t’invitent à explorer, à t’enfouir, à effleurer du doigt les muqueuses qui se laissent approcher.
Tu sens ? Tu perçois les effluves du désir qui commence à sourdre ? Tout à l’heure ces parfums se feront plus forts, plus profonds, plus animaux, plus impérieux, mais sois patient.

Regarde encore : les intentions se font plus précises, les regards plus directs. Les postures parlent. Elle, ça se voit, elle a très envie de ta queue. Elle n’est pas la seule.
Tu ne leur échapperas pas, tu sais. Ces mains, ces lèvres, ces bouches, sauront te happer, t’engloutir, laisser libre cours à leurs envies sur toi.
Mais attends un peu.

Retourne-toi. Tu vois ? Elle, tu ne l’avais pas encore vue, mais maintenant regarde. Regarde comme elle est offerte, impudique au dernier degré. Tu peux la fouiller des yeux, tu peux voir chaque détail de ce qu’elle te montre. En attendant de t’en approcher davantage, tes yeux peuvent caresser le dégradé des teintes et des textures qu’elle offre à ton regard. Regarde. Regarde bien. Mais surtout ne retire pas ton bandeau.

 


Illustration : Carnevale de Gérard Dubois

[1301] Les lectures – la contribution de Valentina

Stormtroopers en goguette

Jérôme, parle moi de la pluie, je n’ai rien oublié, ne le dis à personne, il y a longtemps que je t’aime, de battre mon cœur s’est arrêté…. Je vais bien, ne t’en fais pas… Pars vite et reviens tard… La différence c’est que c’est pas pareil…

Et maintenant on va où ? Être et avoir, en avoir (ou pas) le premier jour du reste de ta vie.

Jérôme, choisis ! Choisis ou TU seras Choisi !

« La vache! »… De l’influence des rayons gamma sur le comportement des marguerites…… Ooooh l’échappée belle, au plus près du soleil, les chemins arides, ni le ciel ni la terre… le cri du cormoran le soir au dessus des jonques, le cri de la lavande dans le champs de sauterelles….

Jérôme, les yeux ne veulent pas en tout temps se fermer….. plaisent aux dieux ces taciturnes qui serrent la vie entre leurs dents.

Jérôme….mais qu’est ce que je viens foutre au milieu de cette révolution?… Les grands sentiments font les bons gueuletons!!!…… Qu’est ce que j’ai fait pour mériter ça ???

J’aimerais partager le printemps avec quelqu’un, deux ou trois choses que je sais d’elle, deux ou trois choses que je sais de
lui, et au milieu coule une rivière.

4 mois, 3 semaines, 2 jours, schéma d’une identification, minuit dans le jardin du bien et du mal, réfutation de tous les jugements tant élogieux qu’hostiles qui ont été jusqu’ici portés sur le film la société du spectacle !

La dernière leçon?……. L’histoire du garçon qui voulait qu’on l’embrasse!

[1300] Les lectures – la contribution de Louize

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Et ma chatte ?

La scène est à Capri, et en fait ce ne sera jamais fini. La villa de Curzio Malaparte, conçue par l’écrivain et audacieusement plantée en 1937 sur un rocher escarpé qui surplombe la Méditerranée, est le décor du drame.
« Il y a Brigitte Bardot et Michel Piccoli, vient de dire le générique, en ajoutant : c’est un film de Jean-Luc Godard ». Devra-t-on attendre longtemps la scène pour laquelle nous sommes venus ? Non, car elle fait l’ouverture. On en dans la pénombre et c’est un peu frustrant.
— Tu vois mes pieds dans la glace ?
— Oui.
— Tu les trouves jolis ?
Foin de propos vaseux sur le tournage d’un film et le rendez-vous avec un producteur américain, on passe aux choses sérieuses. Piccoli va s’en tenir désormais à multiplier les « Oui », si convaincus et admiratifs qu’ils soient.
Les chevilles, les genoux, les cuisses, il les aime.
— Et mes seins, tu les aimes ?
— Oui.
— Doucement, Paul, pas si fort.
Les questions deviennent incongrues. Préfère-t-il ses seins ou la pointe de ses seins ? Il reste sur son quant-à-soi :
— J’sais pas… C’est pareil.
Et soudain la lumière jaillit. Éblouissement du corps de Camille soudain illuminé, comme les statues grecques de ce film regorgeant de dieux et de déesses au soleil. Travelling latéral, des cheveux aux chevilles, de droite à gauche, puis de gauche à droite.
La caméra effleure et caresse sans faire de pause, mais en passant sur les fesses somptueuses nous permet d’apercevoir les marques fatales, nettement imprimées dans la chair, celles de l’élastique du slip qui, forcément, a été ôté depuis peu. On sent le débutant : Godard, n’ayant pas l’habitude de tourner des scènes de nu (il s’y fera, plus tard), n’a pas demandé à son actrice de se déshabiller plus tôt, ces marques en témoignent, et on imagine très bien le tournage, elle plus ou moins réticente, lui contraint par ses producteurs de filmer ce qu’il n’avait pas prévu (mais l’improvisation n’est-elle pas aussi sa marque de fabrique ?)… Tous conscients du culot qu’il va falloir, étonnés de leur propre audace, comme Gainsbourg lorsqu’il enregistrera (avec la même Brigitte, la première fois) son Je t’aime moi non plus… On croit entendre le « Allez, on y va! » et l’actrice se débarrassant prestement de ses vêtements : « Vite, finissons-en ! ».
Et l’obsédante litanie se déroule.
— Et mon visage ?
— Oui.
— Et ma chatte ? Tu l’aimes?
Elle se retourne, tout bascule, les volumes frémissent, les seins vacillent, le venue frémit et la fine toison apparaît.
— Oui.
— Et mes poils ? Tu les aimes, mes poils ?
Le son est moins audible maintenant, la voix de Paul aux trois-quarts couverte par les harmonies enveloppantes de Georges Delerue. Il se penche, son visage vient se nicher dans l’entrecuisse blonde.
— Oui, beaucoup.
Il se courbe encore plus et sa bouche va à la rencontre de la vulve qui s’écarte. On aperçoit sa langue amoureuse.
— Et mon clitoris, tu l’aimes ?
Oui, il l’aime.


"ET MES SEINS TU LES AIMES ?" 50 fantasmes cinématographiques LENNE GERARDCe texte est extrait de l’ouvrage de Gérard Lenne « Et mes seins, tu les aimes ? » Cinquante fantasmes cinématographiques aux éditions La Musardine.

[1299] Les lectures – la contribution d’Ève de Candaulie

Un sein. Autour de l'aréole, la mention « press to turn on »

ELLE ET MOI, Max Berlin

(…) Quelque part dans la ville
Elle et moi
Un jardin
Tranquille
Un regard
Une étreinte
Un frisson
Des yeux qui se lèvent
Une larme qui coule
Doucement
Sur sa joue
La douceur de ses lèvres
Elle et moi
Son corps vibre sous mes caresses
Nos souffles se mêlent
L’amour nous enveloppe
Le velours de sa jupe
Relevé
Ses jambes
Que mes mains découvrent
Elle et moi
Ses mains dans mes cheveux
M’attirent
Me griffent
Excitent mon désir
Son désir
Ma bouche devient folle
Le satin de sa peau
Elle et moi
Ses vêtements se déchirent et libèrent sa chair
Sa voix m’appelle
Je t’embrasse, je t’aime
Tu es belle
Ton ventre, tes seins
Elle et moi
Ton cœur qui bat
Au rythme de l’amour
Ce rythme qui nous emporte loin
Très loin
En toi
Au plus profond de toi
Tu gémis
Mon amour
Aime
Aime de toutes tes forces
Elle et moi
Mes mains
Ma bouche
fouillent ton corps
Décousu
Qui se donne à n’en plus finir
Ton corps
Mon corps
Dans l’herbe
Un cri
Ton cri
Ton plaisir
Et plus rien
Rien
Le calme
L’amour
Elle et moi

[1298] Les lectures – la contribution de P***

Femme nue couverte de bijoux - Paolo Roversi

Les bijoux – Charles Baudelaire

La très-chère était nue, et, connaissant mon cœur,
Elle n’avait gardé que ses bijoux sonores,
Dont le riche attirail lui donnait l’air vainqueur
Qu’ont dans leurs jours heureux les esclaves des Maures.

Quand il jette en dansant son bruit vif et moqueur,
Ce monde rayonnant de métal et de pierre
Me ravit en extase, et j’aime à la fureur
Les choses où le son se mêle à la lumière.

Elle était donc couchée et se laissait aimer,
Et du haut du divan elle souriait d’aise
A mon amour profond et doux comme la mer,
Qui vers elle montait comme vers sa falaise.

Les yeux fixés sur moi, comme un tigre dompté,
D’un air vague et rêveur elle essayait des poses,
Et la candeur unie à la lubricité
Donnait un charme neuf à ses métamorphoses ;

Et son bras et sa jambe, et sa cuisse et ses reins,
Polis comme de l’huile, onduleux comme un cygne,
Passaient devant mes yeux clairvoyants et sereins ;
Et son ventre et ses seins, ces grappes de ma vigne,

S’avançaient, plus câlins que les Anges du mal,
Pour troubler le repos où mon âme était mise,
Et pour la déranger du rocher de cristal
Où, calme et solitaire, elle s’était assise.

Je croyais voir unis par un nouveau dessin
Les hanches de l’Antiope au buste d’un imberbe,
Tant sa taille faisait ressortir son bassin.
Sur ce teint fauve et brun, le fard était superbe !

Et la lampe s’étant résignée à mourir,
Comme le foyer seul illuminait la chambre,
Chaque fois qu’il poussait un flamboyant soupir,
Il inondait de sang cette peau couleur d’ambre !

[1297] Les lectures – la contribution de Jules

un couple nu, enlacé

BOIRE MANGER BAISER

Boire, manger, baiser
Fêter et trinquer
S’embrumer et s’évaporer
S’enfoncer et s’évader

Boire, vivre, baiser
Offrir et s’offrir
Garder et partager
Se muer et s’attacher

Boire, vivre, jouer
Rire et séduire
Attirer et repousser
Énerver et taquiner

Voir, sentir, aimer
Toucher, caresser, observer
Grandir, gonfler, saisir
Et allumer, et regarder

Voir, saisir, aimer
Et se faire avoir, ou réussir
Envoler, déshabiller, dévêtir
S’agenouiller, s’effacer, glisser

Voir, suffire, aimer
Et en demander plus
En demander encore
En demander davantage
Et ne plus s’arrêter

Croire, vouloir et prendre
Rester et se maquiller
Rejeter et accaparer
Tout donner pour tout avoir

Croire, vouloir, pouvoir
Humer, goûter, avaler
Étaler, lécher, se pourlécher
Et fermer les yeux

Croire, vouloir, glorifier
Ne pas renoncer non
Continuer, continuer, continuer
Reprendre et attraper

Boire, baiser et baiser encore
Pénétrer, violer, enculer
Sucer, masturber, fêler
Et jouir, jouir, jouir
Jouir à n’en plus finir.